Mardi 22 janvier 2008
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Affût aux Chevreuils
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Le Pertuis - Vuillecin
(Haut-Doubs)

Vendredi 28 décembre 2007

Trois chevreuils : deux chevrettes et un brocard en "bois de velour" sortent du petit bois en face de mon affût.

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L'approche.

La petite troupe s'interroge.

Passage du Brocard dans l'ombre.
Les bois de ce petit cervidé repoussent chaque année (comme chez le Cerf).

Le saviez-vous ? Brocard (ou brocart) désigne aussi un "riche tissu de soie rehaussé
de dessins brochés en fils d'or et d'argent".

Tout près !

La petite troupe se rassemble de nouveau, puis disparaît derrière la colline...



Petit texte :

"Tout à coup, Firmin me toucha l’épaule.
- Monsieur René, surtout ne bougez pas, ne dites pas un mot. Regardez.
Je levai la tête.
Je fus glacé d’effroi.

Ce fut une angoisse immédiate, à la gorge. Et cependant quoi de plus naturel que ce que je voyais ? Mais soit que le souvenir des paroles de Firmin eût ébranlé mes nerfs, soit que ses dernières allées-venues eussent encore accru leur désarroi extérieur, je fus saisi d’étonnement et de crainte. Quelqu’un venait d’entrer dans la clairière. Il pouvait être cinq heures. Déjà une légère pénombre s’était glissée dans le berceau de rochers et de feuilles. Et l’apparition qui débouchait avec lenteur, sur le sentier, le long de l’Ayguebrun, était sortie du massif d’arbres noirs qui, à gauche, cachait le lit du torrent presque à sec. On n’entendait pas un bruit.
… Le colosse s’était arrêté au milieu de la clairière. Car c’était vraiment un colosse. Je ne saurais lui donner un autre nom. Je n’avais pas la sensation de me trouver devant un homme, mais plutôt devant une puissante bête réfléchie. Le costume de velours brun, les bottes, le ceinturon de cuir, le fusil (une arme courte aussi et d’aspect redoutable) n’y faisait rien. Il y avait par là-dessous des reins de carnassier, des épaules de pachyderme. La masse vivante ainsi arrêtée, juste au milieu de la clairière, semblait jouir surtout d’une espèce de liberté. On eût dit un animal de violence et de choc rendu au calme des instincts naturels, dans ces bois, au fond de cette gorge où, depuis longtemps, on ne voyait que des bêtes en fuite, un renard, un blaireau, une couleuvre, et, par hasard, un homme, en quête de petit gibier.
Le colosse ne bougeait pas. Il examinait la vallée. Sa tête nue était couverte d’un poil ras, taillé en crinière. Je distinguais mal les traits à cause de la distance. Mais on y devinait de grands blocs d’os massifs, troués par des yeux minutieux. Pour l’instant le regard de ces yeux, qui se déplaçaient avec lenteur, se posait tantôt sur le banc de rochers qui barrait le fond de la grotte, tantôt sur les cailloux de l’Ayguebrun. Il ne manifestait aucune inquiètude, car son mouvement répondait à un besoin naturel de se rendre compte. Le corps ne bougeait pas. La tête seule avait tourné un peu de gauche à droite, avec une curiosité sans hâte, où se marquait une force patiente et calme. Je regardais Firmin. Il avait les lèvres serrées, il était blême. Mais lui, non plus, ne perdait pas la maîtrise d’un corps, qui paraissait pourtant lié à des os bien fragiles, quand je le comparais au colosse que je voyais, en contrebas, immobile au milieu des chênes. Malgré sa volonté, tout ce qu’il y avait, en Firmin, de souplesse dans le calcul, d’acier flexible dans la réfléxion, de ténacité dans les dents, d’acuité dans l’œil sec et d’intelligence prudente dans ce profil tranchant, au menton pourtant délicat, sortait alors de ce vêtement gris, où il cachait ordinairement sa finesse et sa force. Lui aussi avait l’air terrible, mais ce n’était peut-être pas tout à fait à son insu. Il devait se voir, se soupeser, se juger, débattre ses chances, en présence de cet être venu, dans toute sa force tranquille, sûr de lui, comme une de ces bêtes qui, le soir, descendent à la rivière pour y boire.
… Le colosse sortit de la clairière aussi lentement qu’il y était entré. Il s’éloignait, j’en étais sûr, pour ne plus revenir sur ses pas et continuer je ne sais quelle ronde solitaire, vers le ravin de Buoux. Cependant je ne pouvais plus détacher mes yeux de la clairière où flottait maintenant comme une buée animale.
- Monsieur René, il se fait tard, me dit Firmin. Il faut rentrer.
Nous pliâmes bagages, et nous reprîmes le chemin des Ramades.
"

Henri BOSCO – Le Sanglier



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