Le Trochiscanthe nodiflore [TN]
n°967 (2025-14)
mardi
8 avril 2025
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
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![]() Foulque macroule (couple) La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 21 février 2025 ![]() La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 21 février 2025 ![]() La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 21 février 2025
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 21 février 2025 on reconnait cet individu a ses plumes blanches près de l'oeil... La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 21 février 2025 La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 21 février 2025
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 28 février 2025 ![]()
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La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 7 mars 2025 La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 7 mars 2025
Foulque macroule
plongeant
![]() ![]() Foulque macroule :
ça gratte !
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) mardi 18 mars 2025 ![]() ![]() ![]() Foulque macroule s'ébrouant La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) mardi 18 mars 2025 ![]() ![]() Foulque macroule : le couple, à sa toilette... La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) mardi 18 mars 2025 ![]() ![]() ![]() ![]() ![]() ![]() Foulque macroule : étirement La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) mardi 18 mars 2025 ![]() ![]() ![]() Couple de Canard colvert La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) mardi 18 mars 2025 ![]() Foulque macroule : le couple La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 23 mars 2025 ![]() ![]() ![]() Foulque macroule La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 28 mars 2025
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Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
vendredi 28 mars 2025 |
"Prologue Elle se trouvait à la cuisine quand cela se produisit : un coup sec et sonore frappé à la porte d’entrée. Le son rebondit dans le couloir, sur le plancher et le porte-chapeaux, ricocha entre les portes coulissantes et la surprit en train d’essuyer la table en rêvassant – elle s’imaginait marchant sur une plage sauvage de l’île Bruny. Elle réintégra d’un seul coup un corps plus vieux de cinquante années. Sa main, en dérapant, envoya une giclée de miettes au sol. Qui pouvait bien lui rendre visite à l’improviste ? Elle reprit sa canne. Derrière le verre dépoli de la porte d’entrée se découpait une silhouette – sans doute quelqu’un démarchant pour des bonnes œuvres… Elle ouvrit les verrous. Un vieux monsieur cravaté de travers, le dos voûté sous son costume bleu marine. Ce visage buriné… L’espace d’un instant, elle se dit qu’elle l’avait déjà rencontré, mais où ? Au club de bowling ? À la paroisse de Jan ? Au magasin caritatif ? Les vieillards se ressemblaient tous, seul l’inventaire de leurs maux les distinguait les uns des autres. — Que puis-je pour vous ? dit-elle. En guise de réponse, il pencha la tête de côté et se passa les doigts dans les cheveux. Au bord du malaise, elle s’agrippa au montant de la porte. Son cœur s’était mis à battre douloureusement. Que faisait-il là ? Il savait qu’il n’était pas le bienvenu. Pourtant, il était devant elle, la fixant de ses yeux d’un bleu délavé dont le regard n’avait rien perdu de son intensité. En voulant reculer, elle fit un faux pas et lâcha sa canne. — Mary, articula-t-il d’une voix grave et éraillée par le grand âge. Il tendit une main qu’elle n’eut pas le réflexe de repousser. Pensait-il vraiment pouvoir l’aider ? Il croyait à l’union de l’aveugle et du paralytique. Si seulement elle avait pu le faire disparaître par la seule magie d’un regard ! Soudain, son pouls s’affola, déclenchant une crise comme elle n’en avait jamais eu. « Évitez tout choc émotionnel », lui avait conseillé le médecin… La mort était censée être la dernière surprise. Posant sur son épaule une main autoritaire, il la conduisit à l’intérieur. Elle n’eut même pas la force de protester. Sa proximité la remplissait d’effroi. Et cette odeur de renfermé, cette odeur de vieux, de vêtements d’une propreté douteuse, de mauvaise haleine. Autrefois il ne sentait pas ainsi, autrefois il sentait bon la noix de muscade et le clou de girofle. D’un signe de tête, elle lui indiqua le chemin de la cuisine. Il tira une chaise et l’aida à s’asseoir. Puis il s’installa en face d’elle et la dévisagea en silence. Elle ne l’aurait pas reconnu si elle l’avait croisé dans la rue. Mais aussi, qui se retournerait sur elle en se disant « Tiens, voilà Mary Mason » ? Elle n’avait jamais été ce qu’on appelle jolie ; elle n’était pas élancée et n’avait pas un teint de porcelaine. Du charme et de la vitalité, en revanche, elle en débordait. Une belle plante, disaient-ils. Elle arrivait à soulever des bottes de foin au bout d’une fourche et à traire les vaches, ce dont les autres filles étaient bien incapables. Et surtout, jusqu’au bout des ongles, elle se sentait vivante. La belle énergie de sa jeunesse, comme elle lui manquait ! Mary s’affaissa. Cet homme en face d’elle, lui, l’avait connue à cette époque. Il continuait à la regarder comme s’il cherchait à lire dans ses pensées. Il pouvait toujours essayer. Il n’avait plus la clé de son esprit. Ah, combien elle maudissait sa faiblesse passée qui l’avait menée à ce moment. Elle qui s’était félicitée de sa force. — Qu’est-ce que tu veux ? dit-elle en desserrant à peine les lèvres. Les yeux vides d’expression, il passa de nouveau ses doigts dans sa maigre chevelure grise – un geste qui la ramenait au temps de leur première rencontre. Il déboutonna son veston et en sortit une enveloppe blanche qu’il posa sur la table. S’efforçant d’ignorer la sensation sourde et douloureuse de pression dans sa cage thoracique, Mary souffla : — Qu’est-ce que c’est ? L’angoisse gagnait le bout de ses doigts. Elle avait des fourmillements dans la poitrine. Ils fixaient tous les deux l’enveloppe encore partiellement recouverte par la main parcheminée du visiteur. — Tu sais ce que c’est, Mary, murmura-t-il en se penchant sans la lâcher des yeux. Elle est pour lui. Elle s’agrippa au bord de la table et fit mine de se lever. — Ne compte pas sur moi. Il vaut mieux qu’il ne sache pas. Le vieil homme émit un rire caverneux. — Je te laisse le choix du moment, Mary. Mais tu ne peux pas m’éliminer. J’existe. J’aurais pu rendre les choses beaucoup plus difficiles. Il se leva et poussa sa chaise. La lettre resta sur la table. — Je vais la jeter, déclara-t-elle. Je la brûlerai. Un mince sourire plissa les lèvres du vieillard et il répliqua : — Mais tu ne le feras pas, Mary. Tout est allé comme tu voulais pendant trop longtemps. Maintenant, c’est à mon tour. J’en ai besoin. Avant de sortir en boitillant, il se retourna à moitié. Malgré la peur qui l’étreignait, elle était émue : ce regard contenait tout ce qui n’avait pas été fait, tout ce qui n’avait pas été dit. Ainsi soit-il. Le calice était bu jusqu’à la lie. Fin de l’histoire. — Au revoir, Mary. Ses pas inégaux s’éloignèrent dans le couloir. — Ne m’oblige pas à faire ça ! cria-t-elle. La porte d’entrée se ferma avec un bruit sourd : il était parti..."
Karen VIGGERS - La
mémoire des Embruns
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