Le Trochiscanthe nodiflore [TN]
n°917 (2024-17)
mardi
23 avril 2024
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
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Bergeronnette grise adulte Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 9 mars 2024 Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 9 mars 2024
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 9 mars 2024 De l'affût...
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 9 mars 2024 <Galaxy A15 - 16/9ème>
Mésange charbonnière
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 dimanche 10 mars 2024
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 dimanche 10 mars 2024 Grive draine Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 dimanche 10 mars 2024 La loge n° 5
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 dimanche 10 mars 2024 <Galaxy A15 - 16/9ème>
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 dimanche 17 mars 2024
dimanche 17 mars 2024
Rougequeue noir femelle Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 dimanche 17 mars 2024 Violette Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 dimanche 17 mars 2024
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 dimanche 17 mars 2024 <Galaxy A15 - 16/9ème>
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 vendredi 22 mars 2024 <Galaxy A15 - 16/9ème>
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"Chapitre premier I Il était tard et la chaleur était étouffante. Fin avait du mal à se concentrer, oppressé par l'obscurité de son bureau qui le maintenait enfoncé dans son siège, comme une immense paire de mains, noires et douces. Le rond de lumière que la lampe projetait sur son bureau l'attirait tel un papillon de nuit et lui brûlait les yeux.Ébloui, il avait du mal à faire le point sur ses notes. À côté de lui, il percevait le scintillement du moniteur de son ordinateur dont le ronflement ne parvenait pas à troubler le calme ambiant. Il aurait dû être au lit depuis un bon moment, mais il devait à tout prix finir cette dissertation. Ces cours par correspondance étaient son unique porte de sortie et il n'avait rien fichu jusqu'à la dernière minute. Stupide. Il sentit un mouvement dans son dos, près de la porte, et pivota rageusement sur son siège, s'attendant à trouver Mona. Mais ses reproches ne franchirent pas ses lèvres. Au lieu de Mona, il se retrouva, stupéfait, face à un homme si grand qu'il avait du mal à se tenir droit. Sa tête était penchée sur le côté pour éviter de toucher le plafond. Les pièces n'étaient pas hautes, mais il devait mesurer près de deux mètres cinquante. Il avait des jambes immenses et un pantalon sombre qui se tassait en plis autour d'une paire de bottes noires. Sa chemise à carreaux en coton était rentrée à la ceinture et, par-dessus, il portait un anorak grand ouvert dont il avait relevé le col, laissant la capuche pendre dans son dos. Les bras ballants, des mains immenses émergeant de manches trop courtes. Le visage ridé, rendu lugubre par des yeux sombres et inexpressifs. Des cheveux longs et gras pendant derrière les oreilles. Fin lui donnait la soixantaine. Il restait muet, immobile, fixant Fin. Son ombre, dessinée par la lumière, se découpait sur le bureau, semblable à une statue. Au nom du Ciel, qu'est-ce que ce type faisait là ? Tous ses poils se hérissèrent et Fin sentit la peur s'emparer de lui, l'envelopper comme un gant. Puis, très loin, il entendit sa propre voix, le gémissement d'un enfant, dans le noir. «Un bonhomme biza-arre...» L'homme continuait à le fixer. «Il y a un bonhomme biza-arre...» «Qu'est-ce qui se passe, Fin ?» C'était la voix de Mona. Paniquée, elle le secouait par l'épaule. Tandis qu'il ouvrait les yeux et voyait son visage apeuré et inquiet, encore gonflé de sommeil, il s'entendit gémir : «Bonhomme biza-arre...» «Mais bon Dieu, qu'est-ce qui ne va pas ?» Il s'écarta d'elle et s'allongea sur le dos, respirant à fond pour essayer de reprendre son souffle. Son coeur battait à cent à l'heure. «C'est juste un rêve. Un mauvais rêve.» L'image de l'homme dans son bureau était encore là, comme un cauchemar d'enfance. Il jeta un oeil au réveil sur la table de chevet. Quatre heures sept. Il essaya d'avaler sa salive, mais sa bouche était sèche et il comprit qu'il ne parviendrait pas à se rendormir. «Tu m'as vraiment fichu la trouille. - Désolé.» Il repoussa les couvertures et s'assit au bord du lit. Il ferma les yeux puis se frotta le visage, mais l'homme était toujours là, gravé sur sa rétine. Il se mit debout. «Où vas-tu ? - Pisser.» Il franchit le tapis sur la pointe des pieds et ouvrit la porte qui donnait sur le couloir. La clarté de la lune y dessinait des motifs géométriques au travers des fenêtres de style vaguement géorgien. A la moitié du couloir,il passa devant la porte ouverte de son bureau. Il y faisait un noir d'encre et il frissonna à la pensée de l'homme gigantesque qui s'y était introduit pendant son rêve. L'image qu'il gardait à l'esprit était encore claire et puissante. Cette présence avait été si forte. Arrivé au niveau de la porte de la salle de bains, il fit une pause, comme chaque nuit depuis presque un mois, et son regard se porta vers la pièce située au bout du couloir. La porte était entrouverte et le clair de lune en éclaboussait l'intérieur. La pièce ne renfermait qu'un terrible vide. Fin se détourna, écoeuré, le front couvert de sueur. Le bouillonnement de
l'urine frappant l'eau emplit la salle de bains d'un bruit
familier et réconfortant. La déprime arrivait toujours avec
le silence. Mais ce soir, le vide habituel avait été occupé.
L'image de l'homme à l'anorak avait pris la place de toutes
ses autres pensées, comme un coucou prend possession d'un
nid. A présent, Fin se demandait s'il le connaissait, s'il y
avait quelque chose de familier dans ce visage allongé, ces
cheveux en désordre. Et, soudain, il se rappela la
description que Mona avait faite de l'homme qui se trouvait
dans la voiture. Il portait un anorak, pensait-elle. Il
devait avoir dans les soixante ans, avec des cheveux gris,
longs et gras..."
Peter MAY - L'île des
chasseurs d'oiseaux
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