Le Trochiscanthe nodiflore [TN]
n°904 (2024-04)
mardi
23 janvier 2024
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
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Mésange charbonnière sous la pluie Courvières (Haut-Doubs), Champ-Margot dimanche 19 novembre 2023 Courvières (Haut-Doubs), Champ-Margot dimanche 19 novembre 2023 Courvières (Haut-Doubs), Champ-Margot dimanche 19 novembre 2023
Courvières (Haut-Doubs), Champ-Margot dimanche 26 novembre 2023 Mésange charbonnière Courvières (Haut-Doubs), Champ-Margot dimanche 26 novembre 2023 Mésange bleue Courvières (Haut-Doubs), Champ-Margot dimanche 26 novembre 2023 Mésange bleue Courvières (Haut-Doubs), Champ-Margot mercredi 29 novembre 2023 Mésange bleue Courvières (Haut-Doubs), Champ-Margot mercredi 29 novembre 2023
Mésange bleue
Mésange bleue La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs), Champ-Margot samedi 16 décembre 2023
Courvières (Haut-Doubs), Champ-Margot dimanche 17 décembre 2023
Courvières
(Haut-Doubs), Champ-Margot
samedi 30 décembre 2023
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Mardi 9
octobre 2012 |
"Il m’a semblé intéressant d’évoquer le livre de Guy Delisle sur la Corée du Nord. Cet excellent dessinateur n’était pas, à l’origine, un auteur de bande dessinée, mais avant tout un "animateur", chargé de réaliser des dessins animés. Sa profession l’a amené à faire quelques voyages dans des pays que je qualifierais d’exotiques pour le Québécois vivant en France qu’il est. En fait, ces pays seraient tout aussi exotiques pour un Australien, un Russe ou un Marocain. Chaque séjour, d’abord seul pour raison professionnelle, puis en famille, pour suivre son épouse médecin sans frontières, a été l’objet d’un journal de voyage où il raconte très candidement ce qu’il y voit et y ressent, sans autre prétention ni ambition. Il n’est donc pas un livre de propagande ; il n’est pas non plus un livre objectif.
Si le livre "Pyongyang"
paru en 2003 (éd. L’Association), retraçant son séjour
de deux mois en Corée du Nord en 2001 (sous le "règne"
de Kim Jong-Il, le père du dernier et le fils du
fondateur de la dynastie), s’est si bien vendu
(traduit dans des dizaines de langues), c’est
justement à cause du manque d’information sur ce pays
et du ton volontairement simple et clair qu’a adopté
Guy Delisle. Pour autant, je le répète, il faut
évidemment se mettre en garde car ce livre n’a aucun
objectif documentaire. C’est une vision et un
ressenti, très subjectifs et personnels, et en aucun
cas un documentaire neutre et factuel sur la société
nord-coréenne.
C’est aussi un effet de
la mondialisation qui
déporte
de nombreuses tâches dites répétitives, mais l’on se
rend compte, à la lecture du livre, que même les
tâches d’exécution sont souvent à corriger plusieurs
fois, en raison de la mauvaise compréhension des
consignes (des gestes trop lents, des yeux qui
louchent, une bouche qui sourit à l’annonce d’une
chose triste, des "gestes culturels" incompréhensibles
et donc mal reproduits, etc.).
Cela dit, la plupart des
anecdotes narrées sont du ressenti réellement vécu,
comme cette idée de faire croire au peuple que la
guerre est imminente.
Le culte de la personnalité y est très fort : amusement, étonnement et nausée s’y bousculent chez l’auteur. Guy Delisle raconte que le portrait des deux dictateurs, Kim Il-Sung et son fils et successeur Kim Jong-Il, sont partout affichés.
Cela permet au dessinateur de dessin animé de s’amuser dans une mise en abyme particulière.
Au point même d’être troublé par des visions paranoïaques qui laissent croire que le commandant suprême des armées surveille chaque fait et geste de chaque citoyen partout et à tout instant.
Ou d’être agacé par le saccage de la nature…
Comble du culte de la personnalité, même mort, Kim Il-Sung, le fondateur, reste le roi, désigné dans un amendement constitutionnel adopté le 5 septembre 1998 (soit plus de quatre ans après sa mort) "Président perpétuel de la République populaire et démocratique de Corée" (il n’existe pas de Corée du Nord en Corée du Nord, il n’existe qu’une Corée). Le calendrier (dit juche) utilisé en Corée du Nord (depuis le 9 juillet 1997) fait commencer le monde l’année de naissance de Kim Il-Sung, en 1912.
La visite des musées est toujours particulière pour les étrangers. La propagande anti-américaine est systématique au point de chercher à convaincre les visiteurs de leur "méchanceté" et "cruauté".
Comment manier à la fois la franchise et la politesse, à la fin d’une visite de musée.
Le Coca-cola comme outil révolutionnaire (ou contre-révolutionnaire) est proposé à l’issue d’une visite touristique.
Autre fait de contestation, provenant d’un citoyen nord-coréen et pas de lui l’étranger, c’est de ne pas aller regarder le film officiel proposé, toujours à base de guerre, d’actes héroïques, et de grandeur du pays.
La capitale nord-coréenne est triste, du point de vue de l’auteur, car rien n’y est improvisé.
Un autre expatrié, qui
bénéficie dans son hôtel de la réception de chaînes de
télévision "occidentales" (CNN et TV5), lui raconte
l’histoire d’un demi-frère de Kim Jong-Un (et fils de
Kim Jong-Il), Kim Jong-Nam, qui, étudiant de 30 ans en
Suisse, avait été arrêté à la douane japonaise avec un
faux passeport dominicain (sous un nom chinois Pang
Xiong), et cela simplement pour aller au parc
d’attractions de Disney à Tokyo en passant
inaperçu ! (Rappelons que le Japon est considéré
comme une nation ennemie car ayant conquis et occupé
le territoire coréen). Menant une vie dissolue, Kim
Jong-Nam a été assassiné à l’aéroport de Kuala-Lumpur
(en Malaisie) le 13 février 2017 (par empoisonnement),
probablement par des agents nord-coréens.
Cherchant quelques avantages à cette situation de délocalisation, Guy Delisle se rend bien compte que le travail commandé donne l’occasion à des petits génies du dessin de sortir de leur village perdu pour aller travailler dans la capitale et avoir une meilleure vie.
Là encore, il retransmet quelques bruits de couloir (vrais ou faux, impossible de le savoir) en disant que d’habitude, la promotion sociale se ferait plutôt, pas par le mérite, mais par la surveillance des citoyens par les eux-mêmes, par la délation, fait que contesteront évidemment les proches du pouvoir nord-coréen.
L’anecdote la plus forte du livre concerne le handicap. Guy Delisle fait constater à son interlocuteur nord-coréen qu’il ne voit aucune personne en situation de handicap. Pourtant, la nature humaine est telle qu’il y a toujours entre 5% et 10% de personnes qui souffrent d’un handicap spécifique, et la population nord-coréenne n’a aucune raison de ne pas se conformer à ce genre de statistiques. La réponse langue de bois est que le peuple nord-coréen est parfait et qu’il est toujours en bonne santé et intelligent. Il manque évident la réponse (et même la question) sur la réalité : que deviennent les personnes réellement en situation de handicap en Corée du Nord ?
Guy Delisle essaie aussi de convaincre son interlocuteur que la pluralité des sources d’informations donne une meilleure vision d’un fait, et il montre un exemplaire du "Canard enchaîné" de la campagne présidentielle de 2002 où les deux principaux candidats Jacques Chirac et Lionel Jospin (les deux têtes de l’Exécutif, les deux chefs politiques !) sont moqués par le dessinateur Cabu (le sujet était sur le choix du futur Premier Ministre de chacun des candidats : Jean-Pierre Raffarin, Alain Juppé, Nicolas Sarkozy ou Philippe Douste-Blazy pour le premier, Laurent Fabius, Dominique Strauss-Kahn, Martine Aubry ou François Hollande pour le second).
En conclusion, cette
dernière question que se pose l’auteur lui-même, sur
le degré de crédulité des Nord-coréens : sont-ils
dupes ou pas de ce que le pouvoir politique leur dit
et qu’ils répètent aux étrangers ?" |
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