Le Trochiscanthe nodiflore [TN]
n°885 (2023-34)
mardi
12 septembre 2023
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
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Renard Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 vendredi 21 juillet 2023 Rougegorge familier Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 vendredi 21 juillet 2023 Rougegorge Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 vendredi 21 juillet 2023
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 22 juillet 2023
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 22 juillet 2023 Bergeronnette grise (jeune) Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 22 juillet 2023 Rougequeue noir et Bergeronnette grise (adulte) Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 22 juillet 2023
Bergeronnette grise adulte Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 22 juillet 2023
Rougequeue noir (adulte) Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 22 juillet 2023 <image recadrée>
Laitue serriole - Lactuca
serriola
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 22 juillet 2023 La laitue serriole présente la particularité d'orienter ses feuilles selon l'axe nord-sud, dans un plan perpendiculaire au sol, ce qui les protège de la brûlure du soleil aux alentours de midi et limite l'évaporation et lui a valu le nom de « plante boussole ». Wikipédia Lièvre
Je me fie aux auteurs pour dire que le mâle
(bouquin) est plus fauve que la femelle (hase), elle-même
plus grisâtre, qu'il a les membres plus longs, la tête plus
large et plus bombée, les oreilles moins longues, moins
larges et plus blanches.
Robert HAINARD -
Mammifères d'Europe
Poursuite Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 29 juillet 2023 Hase (?) Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 29 juillet 2023 Repos
Courvières (Haut-Doubs), loge n° 5 samedi 29 juillet 2023 |
"C'est étrange, d'écrire ces premiers mots, comme si je me penchais par-dessus le silence moisi d'un puits, et que je voyais mon visage apparaître à la surface de l'eau – tout petit et se présentant sous un angle si inhabituel que je suis surprise de constater qu'il s'agit de mon reflet. Après tout ce temps, un stylo a quelque chose de raide et d'encombrant dans ma main. Et je dois avouer que ce cahier, avec ces pages blanches pareilles à une immense étendue vierge, m'apparaît presque plus comme une menace que comme un cadeau – car que pourrais-je y relater dont le souvenir ne sera pas douloureux ? Tu pourrais écrire sur maintenant, a dit Eva, sur l'époque actuelle. J'étais tellement persuadée ce matin que le cahier me servirait à étudier que j'ai dû faire un effort pour ne pas me moquer de sa suggestion. Mais je me rends compte à présent qu'elle a peut-être raison. Tous les sujets auxquels je pense – de l’économie à la météorologie, de l’anatomie à la géographie et à l’histoire – semblent tourner en rond et me ramener inévitablement à maintenant, à ici et aujourd’hui. Aujourd’hui, c’est Noël. Je ne peux pas l’éviter. Nous avons barré les jours sur le calendrier bien trop consciencieusement pour confondre les dates, même si nous aurions aimé nous tromper. Aujourd’hui, c’est le jour de Noël, et le jour de Noël est une nouvelle journée à passer, une nouvelle journée à endurer afin qu’un jour, bientôt, cette époque soit derrière nous. À Noël prochain, tout ceci sera terminé, et ma sœur et moi aurons retrouvé les vies que nous sommes censées vivre. L’électricité sera rétablie, les téléphones fonctionneront. Des avions survoleront à nouveau notre clairière. En ville, il y aura à manger dans les magasins et de l’essence dans les stations-service. Bien avant Noël prochain, nous nous serons permis tout ce qui nous manque maintenant et dont nous avons terriblement envie – du savon et du shampoing, du papier toilette et du lait, des fruits et de la viande. Mon ordinateur marchera, le lecteur CD d’Eva tournera. Nous écouterons la radio, lirons le journal, consulterons Internet. Les banques et les écoles et les bibliothèques auront rouvert, et Eva et moi aurons quitté cette maison où nous vivons en ce moment comme des orphelines qui ont fait naufrage. Ma sœur dansera avec le corps de ballet de San Francisco, j’aurai fini mon premier semestre à Harvard, et ce jour humide et sombre que le calendrier persiste à appeler Noël sera passé depuis très, très longtemps. — JOYEUX Noël semi-païen, légèrement littéraire et très commercial, annonçait toujours notre père le matin de Noël quand, bien avant l’aube hivernale, Eva et moi faisions équipe dans le couloir devant la chambre de nos parents. Tellement excitées que nous ne tenions pas en place nous les suppliions de se lever, de descendre, de se dépêcher, tandis qu’ils bâillaient, s’obstinaient à enfiler leurs peignoirs, à se laver la figure et à se brosser les dents, même – quand notre père était particulièrement agaçant – à faire du café. Après la pagaille et les éclats de rire entourant l’ouverture des cadeaux, venaient le déjeuner que nous trouvions tout naturel, les coups de fil de lointains parents, le Messie de Haendel qui sortait triomphalement du lecteur de CD. À un moment dans l’après-midi, nous allions nous promener tous les quatre sur le chemin de terre qui aboutit à notre clairière. L’air frais et vivifiant et la forêt verte nettoyaient nos sens et nos palais, et lorsque nous arrivions au pont et étions prêts à faire demi-tour, notre père déclarait immanquablement :
L’année suivante, même moi, je n’aurais pas osé contester Noël. Mère était malade, et nous nous raccrochions à tout ce qui était lumineux et sucré et chaud, comme si nous pensions qu’en ignorant les ombres elles s’évanouiraient dans la brillance de l’espoir. Mais au printemps suivant, le cancer l’avait quand même emportée, et à Noël dernier, ma sœur et moi avions fait de notre mieux pour cuire et emballer et chanter dans le fol espoir de convaincre notre père – et nous-mêmes – que nous pouvions être heureux sans elle. Je pensais que nous étions déprimées à Noël dernier. Je pensais que nous étions déprimées parce que notre mère était morte et que notre père était devenu distant et silencieux. Mais il y avait des lumières sur le sapin et une dinde dans le four. Eva était Clara dans le Casse-Noisette que donnait la compagnie de ballet de Redwood, et je venais de recevoir les résultats de mes Scholastic Aptitude Tests, qui étaient suffisamment bons – si je réussissais les College Board Achievement Tests – pour justifier la lettre que je rédigeais à l’intention du comité d’admission de Harvard..." * Parodie d’un chant de Noël : « Nous les mages, les rois du pétrole et du goudron, avons voulu fumer un cigare en caoutchouc, il était chargé et il a explosé, plus haut que l’étoile là-haut. » (Toutes les notes sont de la traductrice.)
Jean HEGLAND - Dans la forêt
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