Le Trochiscanthe nodiflore
[TN]
n°707 (2020-08)
mardi 25 février 2020
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
explications sur le nom de cette
lettre : [ici]
ou [ici]
Si cette page ne s'affiche pas
correctement, cliquez [ici]
Pour regarder et écouter,
|
Mésange charbonnière mâle Courvières (Haut-Doubs) lundi 30 décembre 2019 lundi 30 décembre 2019 lundi 30 décembre 2019
<image recadrée>
Pie Courvières
(Haut-Doubs) dimanche 5 janvier 2020 Courvières (Haut-Doubs) samedi 11 janvier 2020 Courvières
(Haut-Doubs)
<image recadrée>dimanche 12 janvier 2020 Mésange
nonnette
<image recadrée>
Bouverans (Haut-Doubs) dimanche 19 janvier 2020 Courvières
(Haut-Doubs)
<image recadrée>
samedi 8 février 2020 Courvières
(Haut-Doubs)
samedi 8 février 2020 <image recadrée> Mésange
bleue
<image recadrée>
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) samedi 15 février 2020
samedi 15 février 2020
<image recadrée> <image recadrée> La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) samedi 15 février 2020 La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) samedi 22 février 2020 La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) samedi 22 février 2020 La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) samedi 22 février 2020 <image recadrée> La
Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
<image recadrée>
samedi 22 février 2020 <image recadrée> Courvières
(Haut-Doubs)
<image recadrée>
samedi 22 février 2020 <image recadrée>
<image recadrée>
Courvières
(Haut-Doubs)
<image recadrée>
samedi 22 février 2020 <image recadrée>
Courvières
(Haut-Doubs)
samedi 22 février 2020 <image recadrée>
<image recadrée>
Courvières
(Haut-Doubs)
<image recadrée>samedi 22 février 2020 |
"1
Les premiers instants d'une éléphantelle Les éléphants naissent la trome en avant. Et c'est ainsi que la petite Emilia vint au monde, vive et alerte, en février 1986. Il était minuit passé et il faisait bon chaud dans l'écurie des pachydermes du Suomi-Sirkus, qui avait planté son chapiteau dans la ville de Kerava. La soigneuse Sanna Tarkiainen, alias Lucia Lucander, avait veillé toute la soirée, prête à aider à la mise bas. C'était une femme vigoureuse, âgée de vingt ans à peine, originaire de Lemi en Carélie du Sud. Petite fille, déjà, elle avait travaillé au cirque pendant les vacances et, quelques années plus tard, elle avait été admise dans la troupe à titre permanent. Elle rêvait parfois d'accéder au statut d'étoile de la piste, même si elle aimait aussi beaucoup les animaux. Lucia avait prévu d'épaisses couvertures et branché le tuyau d'arrosage. Pepita, la colossale mère éléphant, avait porté son enfant vingt-deux mois, plus du double d'une grossesse humaine. Pendant la gestation, elle avait grossi de plusieurs centaines de kilos et, les deux derniers mois, ses mamelles avaient gonflé de manière prometteuse. Tout allait bien et, quand minuit avait sonné, ses contractions avaient commencé. La mise bas avait duré trois heures, au bout desquelles la petite éléphanelle avait déboulé. Elle n'était d'ailleurs pas si petite, avec son poids d'un homme dans la force de l'âge, cent kilos, mais pour un pachyderme, ce n'était encore rien. Sa tête et son maigre corps frêle étaient entièrement recouverts d'un duvet roux. Ses oreilles, nervurées comme des feuilles de chou, étaient si fines qu'elles en étaient translucides. Lucia l'aspergea d'eau tiède, la lava et la sécha dans les couvertures. Il ne fallut pas cinq minutes pour qu'elle se mette debout. Elle resta d'abord là, chancelante, mais fit bientôt ses premiers pas d'un air déterminé. Pepita s'ébroua et regarda son oeuvre, les yeux brillant dans la pénombre de l'écurie. C'était son premier bébé. Elle était terriblement fatiguée, mais pour le reste tout allait bien. Moins d'une heure plus tard, la petite éléphantelle chercha les mammelles de sa mère. Pour réussir à téter, il lui fallut lever la trompe et la tourner sur le côté. Sa bouche triangulaire rose et duveteuse s'accrocha avec énergie au mamelon. Pepita lui caressa le garrot de sa trompe, en signe d'acceptation. La soigneuse Lucia Lucander, assise sur une botte de paille, regardait la mère et l'enfant se renifler et faire connaissance. Elle se demandait quel nom donner au bébé. Puisque c'était une femelle, peut-être pourrait-on la baptiser Emilia en l'honneur de l'épouse du directeur du cirque, que tout le monde appelait Emmi mais dont le véritable prénom était Emily. Le directeur Wernesi Waistola, justement, venait de s'extraire de son lit, dans sa caravane de commandement, pour admirer le nouveau-né. Il arriva avec une bouteille de champagne sous le bras et sortit deux verres de la poche de son pyjama. Ils burent à la santé de l'éléphantelle. Emilia tétait avec appétit, toutes les heures, le lait de Pepita. Elle commença vite à grandir, prenant près d'un kilo par jour. Au bout de deux semaines, elle porta pour la première fois à sa bouche des graines et du crottin de sa mère. Beurk ! Mais les aliments non digérés des bouses lui fournissaient des sels minéraux. A quatre mois, Emilia mangeait déjà quotidiennement des nourritures solides, foin et pommes de terre bouillies, et, quand vint l'été, on lui donna du fourrage vert. Elle eut bientôt le même régime que les éléphants adultes. Lucia entreprit de lui apprendre des tours. Elle devait rester tranquillement en place et tenir dans sa trompe un long bâton au bout duquel flottait un drapeau finlandais. Quand elle bougeait la tête pour l'agiter, la centaine de spectateurs, sous le chapiteau du cirque, applaudissaient et encourageaient ses premiers pas d'artiste. Comme tous les éléphanteaux, Emilia avait eu au début des difficultés pour boire avec sa trompe. Elle était obligée de s'agenouiller et de laper directement l'eau dans un seau, ce qui n'était pas pratique. Au bout de nombreux essais, elle découvrit enfin qu'il était plus simple d'aspirer le liquide avec sa trompe, puis de le déverser dans sa bouche. Facile, après tout ! Emilia apprit également à utiliser sa trompe pour d'autres tâches. Elle s'en servait aussi adroitement qu'un humain de ses mains. Grâce à elle, elle était capable de déplacer des objets lourds, mais c'était un organe si sensible qu'elle pouvait tout aussi bien ramasser des petits brins de paille ou aspirer une araignée sur sa toile. Emilia avait sept mois quand une nouvelle loi fut promulguée en Finlande, le 12 septembre 1986. Triste jour ! Il était désormais interdit, y compris dans les cirques, de présenter des spectacles mettant en scène des animaux sauvages. Leur exploitation, commerciale ou autre, était maintenant strictement prohibée. Cela revenait à bannir les éléphants du pays. De nombreux pachydermes âgés furent abattus, et les autres vendus à l'étranger, là où ils pourraient encore se produire pendant le temps qui leur restait à vivre. C'était comme si on avait mis de vieux acteurs à la retraite pour des motifs humanitaires. Sauf que, pour les éléphants, il s'agissait de protection animale, car ce ne sont pas des humains, bien qu'ils aient tout de comédiens de caractères. Mais dans cette
Finlande amis des bêtes vivait l'intrépide Emilia,
que sa soigneuse n'avait pas le coeur d'expédier
vers l'inconnu. Un bébé animal ne survit pas seul
sans sa mère dans la jungle, ni même dans un zoo.
Sanna Tarkiainen, alias Lucia Lucander, décida
d'apprendre à son docile pachyderme, qui pesait déjà
une tonne deux, à vivre parmi les hommes, et y
réussit. Elle démissionna de son travail de
soigneuse et d'amuseuse d'animaux du Suomi-Sirkus
afin de guider sa protégée, d'une main douce, dans
la tempête soulevée par des protecteurs des animaux
pourtant intrinséquement animés de bonnes
intentions. Mieux valait un éléphant mort qu'un
éléphant exploité, tel était le mot d'ordre du
jour..."
Arto
Paasilinna - Un éléphant, ça danse
énormément
|
|