Le Trochiscanthe nodiflore
[TN]
n°703 (2020-04)
mardi 28 janvier 2020
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
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Courvières (Haut-Doubs) samedi 9 novembre 2019 Lever du soleil sur le Champ Margot Courvières (Haut-Doubs) lundi 11 novembre 2019 <les images sont un peu plus "allongées", au format 16/9ème> Courvières
(Haut-Doubs) lundi 11 novembre 2019 Ma ferme
Courvières (Haut-Doubs) lundi 11 novembre 2019 Le Champ
Margot
Courvières (Haut-Doubs) mercredi 13 novembre 2019 Le Champ
Margot
Courvières
(Haut-Doubs)Courvières (Haut-Doubs) mercredi 20 novembre 2019 mercredi 20 novembre 2019 Courvières (Haut-Doubs) mercredi 20 novembre 2019 Courvières
(Haut-Doubs)
La
Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)samedi 30 novembre 2019 jeudi 5 décembre 2019 La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) vendredi 6 décembre 2019 Courvières
(Haut-Doubs)
Bannans
(Haut-Doubs)mardi 10 décembre 2019 jeudi 12 décembre 2019 Courvières
(Haut-Doubs)
samedi 14 décembre 2019 Bannans (Haut-Doubs) lundi 23 décembre 2019 La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) lundi 23 décembre 2019 La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) jeudi 26 décembre 2019 samedi 28 décembre 2019 La
Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
dimanche 29 décembre 2019
La
Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
dimanche 29 décembre 2019 Château de
Joux
La Cluse et Mijoux (Haut-Doubs) lundi 30 décembre 2019 La
Cluse et Mijoux (Haut-Doubs)
lundi 30 décembre 2019 Courvières
(Haut-Doubs)
mardi 31 décembre 2019 Champ Margot
Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er janvier 2020 La
Planée (Haut-Doubs)
jeudi 2 janvier 2020 Lac
de Saint-Point (Haut-Doubs)
jeudi 2 janvier 2020 Lac
de Saint-Point (Haut-Doubs)
jeudi 2 janvier 2020 Grande
Angélique
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs) jeudi 2 janvier 2020 Port-Titi
(hommage à Roland dit "Toto" je ne boirai plus le café dans sa cabane !...) Lac de Saint-Point (Haut-Doubs) jeudi 2 janvier 2020 Lac
de Saint-Point (Haut-Doubs)
jeudi 2 janvier 2020 Lac
de Saint-Point (Haut-Doubs)
jeudi 2 janvier 2020 Bouverans
(Haut-Doubs)
dimanche 5 janvier 2020 La
Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) Courvières
(Haut-Doubs) Courvières
(Haut-Doubs) La
Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) La
Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) Etonnoir
de Bouverans (Haut-Doubs) Etonnoir
de Bouverans (Haut-Doubs) Etang
de Frasne (Haut-Doubs) La
Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) La
Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) Entonnoir
de Bouverans (Haut-Doubs) Entonnoir
de Bouverans (Haut-Doubs) Entonnoir
de Bouverans (Haut-Doubs) Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 janvier 2020 Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 janvier 2020 Cascades du Hérisson (Jura) dimanche 26 janvier 2020 |
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Je suis frappée de voir à quel point, chez les marins, le bonheur de la navigation en solitaire va de pair avec l'amour du monde vivant et de ses paysages. Rentré à terre, Moitessier suivra la création en 1970 de l'association Les Amis de la Terre par son ami Alain Hervé, qui a lui-même navigué autour du monde pendant trois ans. Il s'engagera également dans la lutte contre les essais nucléaires français dans le Pacifique Sud et, en 1980, il publiera une lettre ouverte demandant aux maires de France de planter des arbres fruitiers le long des routes dans tous les villages : « des arbres fruitiers qui appartiendraient à nous tous, y compris les oiseaux et les abeilles » parce que « planter des arbres fruitiers c'est, à un niveau modeste, participer à la création du monde ». Tous les carnets de bord que j'ai parcourus se font l'écho de ces moments de communion, d'émerveillement face aux cycles naturels de la mer, au comportement de ses habitants, aux repères célestes qui guident et au sentiment de plénitude qui prend le petit bouchon flottant à se sentir faire partie d'un vaste géant. Cette esthétique de la conscience est difficile à appréhender lorsqu'on ne sort jamais des remparts de la ville, qu'on ne voit plus le ciel changer, quand les saisons ont disparu. J'ai vécu en ville toute ma vie et quand je suis partie vivre dans le Diois il y a dix ans, c'est avant tout le choc du retour à la beauté qui m'a percutée. Le fait de pouvoir poser son regard et se rincer l'âme dans la contemplation d'une montagne, de découvrir qu'il y a vraiment quatre saisons, une météo différenciée avec des écarts de plusieurs dizaines de degrés et des produits de saison qui font leur apparition. Redécouvrir l'impatience des feux de cheminée en été et celle des tomates en hiver. Marcher en forêt, planter des graines les ongles cafits de terre, se baigner dans une rivière. Eprouver par l'ensemble de ses sens ce que le cerveau intuitait par le raisonnement est l'ultime étape, cruciale, vers l'engagement sincère : c'est toute la différence entre le savoir et la connaissance. C'est enfin ce qui permet de ne pas s'égarer dans des critiques de la théorie sans fin, parce qu'enfin cet univers que nous risquons de perdre sort de l'intellect pour vous atterrir dans les mains, et qu'il faut bien alors chercher qu'en faire. La séparation du sauvage et l'effacement du beau dans les sociétés modernes bétonnées, dans les quartiers populaires ou en zones d'activités rurales, est un appel scélérat au renoncement : quand votre regard ne porte que sur du gris, du béton, des déchets et des zones vagues, qu'est-ce que ça vous donne à défendre ? A quel moment, dans une décharge à ciel ouvert, se dit-on qu'il ne faut pas balancer son mégot, sa paille, sa canette par la fenêtre ? Dans un parterre de détritus, un déchet de plus ne change pas grand-chose. Sur un sol herbeux, ou simplement propre, l'unicité du geste lui confère une plus ample part de responsabilité. Et j'ai beau me sentir un peu ridicule quand je mets mon mégot dans ma poche à Paris ou à Marseille, je le fais quand même : à défaut d'arrêter de fumer, ce geste contient sa petit part de décence et de tenue. Parce que jamais il ne me viendrait à l'idée de l'écraser sur un chemin de terre du Vercors. Il existe un lien organique entre l'exposition à la beauté et sa puissance d'émancipation et de dignité, comme le dépeint William Morris lorsqu'il dit vouloir « étendre le sens du mot art jusqu'à englober la configuration de tous les aspects extérieurs de notre vie », persuadé qu' « il n'existe rien de ce qui participe à notre environnement qui ne soit beau ou laid, qui ne nous ennoblisse ou nous avilisse ». C'est ce même lien qu'Elisée Reclus revendique lorsqu'il écrit que « là où le sol s'est enlaidi, là où toute poésie a disparu du paysage, les imaginations s'éteignent, les esprits s'appauvrissent, la routine et la servilité s'emparent des âmes et les disposent à la torpeur et à la mort ». Les revendications d'esthétique, que ce soit au niveau architectural, artistique ou culturel, ne sont pas des aspects périphériques de la politique. De même qu'on peut faire la révolutions en talons, dans sous la pluie et se parer les lèvres en rouge pour assister à un procès,il ne s'agit de chasser ni le plaisir ni la volupté. Tout comme la sincérité écologique ne consiste pas à grelotter dans un pull qui gratte, la pureté idéologique ne se mesure pas aux privations. Porter un discours austère et maussade n'est pas toujours gage de sérieux. Oublier sa féminité ne sert pas forcément la cause féministe. Et amputer le discours politique de ce qui peut inspirer l'esprit est le meilleur moyen de se couper aussi de celles et ceux à qui on veut s'adresser. C'est pourquoi nous avons besoin de mêler davantage création artistique, souci environnemental et critique social. Parce que sans corps, sans regard, sans toucher et sans parfum, la politique est dépourvue de ce qui fait la plus belle part de l'humain, sa capacité à éprouver et à transcrire ce qui a été ressenti pour le partager. Dépourvue de ses sens, la politique n'est plus rien qu'un discours désincarné, lunaire et, à force, déserté. Au croisement de la dignité et de l'esthétique, et à rebours des théories de l'immatérialité de l'âme, il y a probablement là encore une nouvelle forme de spiritualité hédoniste à explorer..."
Corinne
Morel Darleux – Plutôt couler en beauté
que flotter sans grâce
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