Le Trochiscanthe nodiflore [TN]

n°678 (2019-29)

mardi 16 juillet 2019

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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Thylacine - Irkutsk

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Moineaux, Chardonneret,
Mésange et Grive litorne

Courvières (Haut-Doubs)
mai et juin 2019



Moineau domestique mâle
Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 12 mai 2019


Moineau domestique mâle,
à la recherche de matériaux pour son nid...

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 12 mai 2019



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Moineau domestique mâle,
au pied d'un poireau

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 12 mai 2019

Chardonneret élégant
Courvières (Haut-Doubs)
mercredi 22 mai 2019

Courvières (Haut-Doubs)
vendredi 24 mai 2019

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Courvières (Haut-Doubs)
vendredi 24 mai 2019

Grive litorne
Courvières (Haut-Doubs)

vendredi 24 mai 2019

Portrait
Courvières (Haut-Doubs)

dimanche 26 mai 2019
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Troupe de Corneille noire
Courvières (Haut-Doubs)

dimanche 26 mai 2019

Envol
Courvières (Haut-Doubs)

dimanche 26 mai 2019

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 26 mai 2019


Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 26 mai 2019

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Courvières (Haut-Doubs)
samedi 1er juin 2019

ça gratte !
Courvières (Haut-Doubs)

samedi 1er juin 2019


Courvières (Haut-Doubs)
samedi 1er juin 2019

Jeune Moineau domestique
Courvières (Haut-Doubs)

dimanche 2 juin 2019

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 2 juin 2019

Courvières (Haut-Doubs)
vendredi 7 juin 2019

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Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 16 juin 2019
<image recadrée>

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 16 juin 2019

<image recadrée>

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Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 16 juin 2019

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 23 juin 2019

Grive litorne plongeant...
Courvières (Haut-Doubs)

dimanche 23 juin 2019

Grive et Moineau
Courvières (Haut-Doubs)

dimanche 23 juin 2019

Etirement
Courvières (Haut-Doubs)

dimanche 23 juin 2019

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 23 juin 2019
<image recadrée>

Courvières (Haut-Doubs)
jeudi 27 juin 2019

Jeune Mésange bleue
Courvières (Haut-Doubs)

jeudi 27 juin 2019

Courvières (Haut-Doubs)
jeudi 27 juin 2019




Suggestion de lecture :

"VII

Dans sa Lettre sur les aveugles, Diderot analyse le problème théorique soulevé par un aveugle de naissance auquel on rendrait la vue : pourrait-il déduire de ce qu'il voit la notion de distance ? En effet, selon qu'il est plus ou moins près de l'oeil, un objet grossit ou diminue. Comment savoir sans le toucher quelle est sa taille « véritable » et, partant, à quelle distance il se trouve de nous ? Cette question de l'étendue est généralement rattachée à une expérience. Nous nous déplaçons, et de ce déplacement naît la notion que nous avons de l'espace. Tout le monde fait à peu près le même déplacement, dans une maison, une ville, une province, à la rigueur en parcourant tout un pays.

Traverser la Sibérie est autre chose. Aucune expérience ne peut se comparer à cela. Ce déplacement gigantesque donne une autre mesure de l'étendue. Elle introduit à la notion d'infini.

Il me suffira de dire qu'il nous a fallu près d'une année, en voyageant chaque jour ou presque, pour parvenir au lieu de notre déportation. Une pleine année à pénétrer chaque jour plus avant dans une étendue infiniment monotone, couverte de forêts plus ou moins denses, souvent basses, clairsemées de bouleaux et de petits sapins, parfois ouverte en landes de sphaignes. A traîneau, à cheval, en tarantass, souvent à pied, nous avons jour après jour attendu que quelque chose se passe qui anime le paysage. En vain. Une fois quittées les villes, on se rend compte combien l'habitat humain est concentré, blotti sur les bords de cette terre immense. L'humanité, dans ces espaces, est accablée par l'évidence de sa solitude. L'infini de la Sibérie donne une idée d'autres infinis, celui des mers et celui du ciel, dans lesquels Pascal, le premier à notre époque, a pris la mesure de notre insignifiance.

Et puis, en Sibérie, quand on s'y attend le moins, la toile de cette monotonie se déchire et il en jaillit un événement imprévu, marqué lui aussi par la démesure : un fleuve, si large qu'on n'en distingue pas l'autre berge, ou des montagnes effrayantes qui brandissent la double menace de leurs pics instables et de leurs gorges escarpées.

En une année, le voyageur a le temps de découvrir à ses dépends les écarts brutaux du climat. L'été torride, étouffant et poussiéreux, rend inconcevable l'arrivée pourtant si proche d'un hiver de neige en tempête et de vents glaciaux. La peau humaine tantôt ruisselante dans la fournaise de l'été se met ensuite à coller aux fers que bleuit le froid extrême.

Il y a deux manières opposées et cependant comparables de punir un homme : le condamner à l'enfermement ou le jeter dans l'infini. J'avais jusque-là fait l'expérience des geôles et goûté de leur cruauté. J'avais crié dans des cachots et frappé des poings sur leurs murs. Il me semblait que j'avais éprouvé le pire. C'est que je n'avais pas connu la Sibérie.

En y entrant, on sent se tendre jour après jour puis se rompre le fil qu'on croyait solide et qui nous reliait à l'humanité. On ne vit pas seulement séparé de ce que l'on aime, comme dans une prison, on lui devient étranger. On perd d'abord l'espoir de retrouver un jour une maison familière, une ville accueillante, de vraies campagnes, puis on se dit que quand bien même on aurait le bonheur de se voir rendu à ces plaisirs, le souvenir que l'on rapportera des solitudes sibériennes nous interdira à jamais de reprendre une vie normale. L'expérience pascalienne de l'infini nous rendra inconsolable par le seul moyen du divertissement. Aucune chaleur humaine ne pourra jamais réchauffer nos âmes glacées par ces terres désolées.

Cependant, à mesure que l'on se sent plus irrémédiablement coupé de la société des humains, on est prêt à en reconstituer une autre, peu nombreuse évidemment, avec des êtres semblables à nous qui ne sont plus reliés à rien mais qui conservent un seul lien : leur humanité.

Ces humains sont égaux ou peu s'en faut. Le prisonnier et le geôlier souffrent de la même faim, du même froid, de la même monotonie. Le dernier des serfs évadé et réfugié dans les bois peut se réchauffer autour du même feu que le grand seigneur banni ou le savant exilé.

Les humains ne vivent pas concentrés en Sibérie, ni séparés des autres par des murs. Une main céleste les a jetés là, sans ordre, comme des semences sur des sillons de labour. La différence est que, sur le sol sibérien, ils ne prennent pas racine et restent épars, suspendus aux nouveaux décrets d'un destin qui les a pourtant abandonnés.

Ainsi se constitue l'étonnant paradoxe de l'infini sibérien. C'est le lieu le plus primitif qui soit. La nature n'y connaît aucune limite, n'y subit aucun outrage. Au petit matin, quand le soleil lance ses rayons ras entre les troncs des arbres tordus, il semble au spectateur indiscret que le monde s'éveille, en même temps que la nature. La terre n'a plus d'âge ; la Création date d'hier. Rien n'a changé depuis la Genèse.

Malgré tout, dans ce décor d'aube des temps, on rencontre les personnages les plus éduqués, les plus polis, les plus nobles que les sociétés humaines au faîte de leur développement ont pu engendrer. Il en venait de partout, des Hongrois, des Suédois, des Grecs, des Allemands. On trouvait parmi eux des médecins, des chirurgiens, des géomètres, des marchands, des banquiers. Et, parmi les Russes, toutes sortes d'officiers et d'hommes de cour, et jusqu'à des princes qu'un mot, un soupçon, une insolence seulement avait précipités des ors de Pétersbourg jusqu'au plus profond des forêts de Sibérie.

Au début du voyage, nous rencontrâmes encore des villes dignes de ce nom, comme Tobolsk ou Tomsk. Mais à mesure que nous avancions, les garnisons stationnées de loin en loin étaient abritées par de simples forts en bois. Les marchés où se faisait le commerce principal de la Sibérie, celui des fourrures, malgré le grand prix de ces marchandises, n'étaient formés que de cabanes et d'étals en bois mal équarris.

L'idée d'évasion saisissait les bannis dès qu'ils avaient connaissance de leur condamnation. Mais les difficultés pour s'enfuir étaient nombreuses. Comment dénicher de quoi manger dans ces étendues de bois ou de landes ? Même avec le soutien dont nous disposions, il nous arriva de nous nourrir d'écorces de bouleau trempées d'eau et nos chevaux en étaient souvent réduits à manger la mousse qui poussait sur les troncs d'arbres. De plus, les forêts avaient beau ne pas être denses, elles étaient encombrées de taillis épais à travers lesquels il était quasiment impossible de tracer un chemin. Il fallait donc soit suivre des routes que surveillaient les cosaques, soit prendre le risque de se perdre. Dans certaines régions, des tribus tatares hostiles menaçaient d'attaquer les garnisons et plus encore les fuyards. Convaincus de ces dangers, les bannis que nous rencontrions sur notre route, quelque envie qu'ils eussent de recouvrer la liberté, n'entreprenaient rien pour y parvenir. Ils faisaient état de leur présence dans la région depuis des années. Des enfants de bannis, nés sur place, avaient rejoint l'armée et obtenaient parfois des grades élevés.

Dans une zone peuplée de Tatars toungouses, éleveurs paisibles et sans agressivité à notre égard, un marchand de fourrures me proposa de m'évader par la Chine. Il connaissait les chemins pour l'atteindre. Hélas, mon état s'était aggravé pendant le trajet et plusieurs de mes blessures, mal refermées, s'étaient mises à suppurer. Je refusai.

Nous poursuivîmes notre voyage dans la boue du dégel, la chaleur de l'été, les pluies d'automne, et jusqu'à retrouver le gel de l'hiver..."


Jean-Christophe RUFIN - Le tour du monde du roi Zibeline



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