Le Trochiscanthe nodiflore
[TN]
n°676 (2019-27)
mardi 2 juillet 2019
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
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Givre Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 Orties givrées Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 <image recadrée>
Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 ça dégrivre...
Corneille
noireCourvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 <image recadrée> Chardonneret
élégant sur un bloc de sel
La Corneille
passe...Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 <image recadrée> <image recadrée>
Couple de Chardonneret
Etourneau
sansonnet<image recadrée> Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 <image recadrée>
Groupe de Corneilles Pissenlit Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 (tout près !!) Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019
Devant une génisse... Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 Des poils de vaches... pour le nid !
Courvières
(Haut-Doubs)Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 mercredi 1er mai 2019 <image recadrée> La loge n° 5 Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 Aubépine
Le brocard...
m'a senti !Courvières (Haut-Doubs) mercredi 1er mai 2019 Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 Toilette dans la brume Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 Barbarea
vulgaris
Verdier
d'EuropeCourvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 A la recherche de poils de vache... Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 <image recadrée> "grosse" Chevrette
(loin) Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 <image recadrée> Rougequeue
noir mâle,
Alchemilledans la loge n° 5 Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 Fraisier des bois Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 Dentaire pennée et Aurore mâle Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 Aurore
mâle en vol
Aurore
mâle<image recadrée> <image recadrée> Aurore
femelle (?)
Courvières
(Haut-Doubs)<image recadrée> dimanche 26 mai 2019 Aubépine Courvières (Haut-Doubs) dimanche 26 mai 2019 Pigeon
ramier
(dans l'ombre) Courvières (Haut-Doubs) jeudi 30 mai 2019 Mésange
charbonnière <image recadrée>
Courvières
(Haut-Doubs)jeudi 30 mai 2019 Courvières
(Haut-Doubs)
jeudi 30 mai 2019 <image recadrée>
Portrait de Geai
des chênes(tout près !) Courvières (Haut-Doubs) jeudi 30 mai 2019 <image recadrée> <image recadrée>
Nettoyage du becc
A la recherche de chenilles...<image recadrée> Courvières (Haut-Doubs) jeudi 30 mai 2019 Inquiet ? <image recadrée>
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de retour dans son bosquet (loin !)
Courvières (Haut-Doubs) jeudi 30 mai 2019 <image recadrée>
Courvières
(Haut-Doubs)
jeudi 30 mai 2019 |
"1
« Verse-moi encore un verre de slivovice », me dit Klara, et je ne fus pas contre. Nous avions trouvé pour ouvrir la bouteille un prétexte qui n'avait rien d'extraordinaire, mais qui tenait : je venais de toucher ce jour-là une assez jolie somme pour une longue étude parue dans une revue d'histoire de l'art. Si mon étude avait fini par être publiée, ça n'avait pas été sans mal. Ce que j'avait écrit n'était qu'épines et polémiques. C'est pourquoi la revue La pensée plastique, avec sa rédaction grisonnante et circonspecte, avait refusé ce texte que j'avais finalement confié à une revue concurrente, mois importante il est vrai, mais dont les rédacteurs sont plus jeunes et plus irréfléchis. Le facteur m'avait apporté le mandat à la faculté, ainsi qu'une lettre. Lettre sans importance et que je parcourus à peine le matin, frais émoulu de ma toute nouvelle grandeur. Mais une fois de retour à la maison, tandis que l'on approchait de minuit et que le niveau baissait dans la bouteille, pour nous amuser je pris cette lettre sur mon bureau et la lus à Klara : « Cher camarade – et si je peux me permettre d'user de ce terme – cher collègue – paronnez à un homme auquel vous n'avez jamais parlé de votre vie de prendre la liberté de vous écrire. Je m'adresse à vous pour vous prier de bien vouloir lire l'article ci-joint. Je ne vous connais pas personnellement mais je vous estime, car vous êtes à mes yeux l'homme dont les opinions, le raisonnement, les conclusions m'ont toujours paru corroborer de manière surprenante les résultats de mes propres recherches... » Suivaient de grandes éloges de mes mérites et une requête : il me demandait d'avoir l'obligeance de rédiger une note de lecture à l'intention de la revue La Pensée plastique qui, depuis six mois, refusait et dénigrait son article. On lui avait dit que mon avis serait décisif, de sorte que j'étais désormais son seul espoir, la seule lueur dans ses ténèbres têtues. Klara et moi, nous échangions toutes sortes de blagues sur ce M. Zaturecky dont le nom pompeux nous fascinait ; des blagues, bien entendu, tout à fait cordiales, car l'éloge qu'il m'avait adressé me rendait généreux, surtout avec une bouteille d'excellente slivocice à portée de main. Si généreux qu'en ces instants inoubliables j'éprouvais de l'amour pour le monde entier. Ne pouvant faire des cadeaux au monde entier, j'en faisais du moins à Klara. Et sinon des cadeaux, du moins des promesses. Klara, avec ses vingt ans, était une jeune fille de bonne famille. Que dis-je de bonne, d'excellente famille ! Son père, ancien directeur de banque, et représentant par conséquent de la grande bourgeoisie, avait été expulsé de Prague vers 1950 et il était allé s'installer au village de Celakovice, à une distance respectable de la capitale. Sa fille, mal notée par la section des cadres, travaillait comme couturière devant une machine à coudre dans l'immense atelier d'une entreprise de confection pragroise. Ce soir-là, assis en face d'elle, j'encourageais son penchant pour moi en lui vantant à la légère les avantages de la place que je promettais de lui procurer avec l'aide de mes amis. J'affirmai qu'il était inadmissible qu'une aussi charmante fille perdit sa beauté devant une machine à coudre et je décidai qu'elle devait devenir mannequin. Klara ne me contredit pas et nous passâmes la nuit dans une heureuse harmonie.
2
Nous traversons le présent les yeux bandés. Tout au plus pouvons-nous pressentir et deviner ce que nous sommes en train de vivre. Plus tard seulement, quand est dénoué le bandeau et que nous examinons le passé, nous nous rendons compte de ce que nous avons vécu et nous en comprenons le sens. Je m'imaginais, ce soir-là, boire à ma réussite et je ne me doutais pas le moins du monde que c'était le vernissage solennel de ma fin. Et parce que je ne me doutais de rien, je m'éveillai de bonne humeur le lendemain, et tandis que Klara dormait encore d'un sommeil heureux je pris l'article joint à la lettre de M. Zaturecky et me mis à le lire au lit avec une indifférence amusée. L'article, intitulé Un maître du dessin tchèque, Mikolas Ales, ne méritait même pas cette demi-heure distraite que je lui accordai. C'était un ramassis de lieux communs accumulés sans le moindre sens du développement logique, sans la moindre idée originale. C'était, incontestablement, une ineptie. Ce que le docteur Kalousek, rédacteur en chef de la revue La Pensée plastique (personnage au demeurant des plus antipathiques), me confirma le jour même par téléphone. Il m'appela à la faculté et me dit : « As-tu reçu la dissertation de M. Zaturecky ? Eh bien, rends-moi le service de rédiger cette note, cinq spécialistes lui ont démoli son article, mais il continue d'insister et il s'imagine que tu es la seule et unique autorité. Ecris en quelques lignes que ça ne tient pas debout, tu es bien placé pour cela, tu sais être acerbe, et il nous fichera la paix. » Mais quelque chose en moi se rebiffa : Pourquoi devrai-je être, justement moi, le bourreau de M. Zaturecky ? Etait-ce moi qui touchais pour cela un salaire de rédacteur en chef ? Je me rappelais d'ailleurs fort bien que La Pensée plastique avait jugé prudent de refuser mon étude ; en outre, le nom de M. Zaturecky était fortement lié pour moi au souvenir de Klara, de la bouteille de slivovice et d'une belle soirée. Et enfin, je ne vais pas le nier, c'est humain, je pourrais compter sur les doigts les gens qui me prennent pour « la seule et unique autorité ». Pourquoi me faire un ennemi de cet unique admirateur ? Je terminai l'entretien avec Kalousek par quelques mots spirituels et vagues que chacun de nous pouvait considérer comme il l'entendait, lui comme une promesse et moi comme une échappatoire, et je raccrochai, fermement résolu à ne jamais écrire de note de lecture sur M. Zaturecky. Je pris donc du papier à lettres dans mon tiroir et j'écrivis à M. Zaturecky une lettre où j'évitais soigneusement de formuler une appréciation quelconque sur son travail et lui expliquais que mes idées sur la peinture du XIXè siècle sont en général tenues pour erronées, surtout à la rédaction de La Pensée plastique, si bien que mon intervention risquerait d'être plus nuisible qu'utile ; en même temps, j'accablais M. Zaturecky d'une éloquence amicale où il ne pouvait pas ne pas voir une marque de sympathie à son égard. Aussitôt cette lettre mise à la boîte, j'oubliai M. Zaturecky. Mais M. Zaturecky ne m'oublia pas.
3
Un beau jour, comme je venais de terminer mon cours (j'enseigne l'histoire de la peinture), la secrétaire, Mme Marie, afflable dame d'un certain âge qui me prépare le café et repond que je ne suis pas là quand se font entendre au téléphone d'indésirables voix féminines, vint frapper à la porte de la classe. Elle passa la tête et me dit qu'un monsieur m'attendait. Les messieurs ne me font pas peur. Je pris congé de mes étudiants et sortis le coeur léger dans le couloir où un monsieur de petite taille, en costume noir usé et en chemise blanche, me salua. Puis il m'annonça très respectueusement qu'il s'appelait Zaturecky. Je fis entrer mon visiteur dans une pièce vide, lui offris un fauteuil et j'engageai la conversation d'un ton jovial, parlant de tout et de rien, du vilain été que nous avions et des expositions pragoises. M. Zaturecky acquiesçait poliment à mes futilités, mais cherchait aussitôt à rattacher chacune d'elles à son article qui se trouva soudain entre nous dans son invisible substance comme un irrésistible aimant. « J'écrirais bien volontiers une notre sur votre travail, dis-je enfin, mais je vous ai expliqué dans ma lettre que personne ne me tient pour un spécialiste de la peinture tchèque du XIXè siècle et qu'en plus je ne suis pas dans les meilleurs termes avec la rédaction de La Pensée plastique où l'on voit en moi un moderniste invétéré, si bien que même une appréciation favorable de ma part ne pourrait que vous nuire.
Avec quelle insouciance et de quel pauvre métal forgeons-nous nos subterfuges ! Je ne savais que répondre à M. Zaturecky. Levant machinalement les yeux pour le regarder en face, je vis d'innocentes petites lunettes démodées, mais aussi une profonde ride énergique, tracée verticalement sur son front. Dans un bref instant de lucidité, un frisson parcourut ma colonne vertébrale : Cette ride attentive et opiniâtre ne reflétait pas seulement le martyre intellectuel de son propriétaire penché sur les dessins de Mikolas Ales, mais une force de volonté peu commune. Perdant toute présence d'esprit, je ne parvenais plus à trouver d'excuses suffisamment habiles. Je savais que je rédigerais pas cette note de lecture mais je savais aussi que je n'avais pas la force de le dire en face au petit homme suppliant. Je me mis à sourire et à proférer de vagues promesses. M. Zaturecky me remercia en disant qu'il reviendrait bientôt se renseigner ; je le quittai avec des sourires plein la bouche. Il revint effectivement quelques jours plus tard, je parvins adroitement à l'éviter, mais on m'annonça le lendemain qu'il m'avait de nouveau demandé à la faculté. Je compris que ça tournait mal. J'allai aussitôt trouver Mme Marie afin de prendre les mesures qui s'imposaient. « S'il vous plaît, Marie, si jamais ce monsieur revient et me demande, dites-lui que je suis parti faire un voyage d'études en Allemagne et que je ne sais pas de retour avant un mois. Autre chose : tous mes cours ont lieu le mardi et le mercredi. Désormais, je ferai les cours le jeudi et le vendredi. Seuls mes étudiants en seront informés, ne le dites à personne et ne modifiez pas l'emploi du temps. Il faut que je passe dans la clandestinité. »..."
Milan
KUNDERA - Risibles amours
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