Le Trochiscanthe nodiflore
[TN]
n°645 (2018-45)
mardi 6 novembre 2018
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
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Moineau domestique mâle Courvières (Haut-Doubs) samedi 20 octobre 2018 Portrait Courvières (Haut-Doubs) samedi 20 octobre 2018 <image recadrée> Courvières (Haut-Doubs) samedi 20 octobre 2018
Mésange charbonnière Courvières (Haut-Doubs) samedi 20 octobre 2018 <image recadrée>
Courvières
(Haut-Doubs)samedi 20 octobre 2018 <image recadrée> Phacélie à
feuille de Tanaisie
Courvières
(Haut-Doubs)j'ai semé cette plante dans mon jardin, pour faire de l'engrais vert... et c'est aussi une excellente plante mellifère ! Courvières (Haut-Doubs) samedi 20 octobre 2018 dimanche 21 octobre 2018 Courvières (Haut-Doubs) dimanche 21 octobre 2018 <image recadrée> Dans l'ombre
<image recadrée>
Courvières (Haut-Doubs) dimanche 4 novembre 2018 <image recadrée>
Moineau
domestique femelleCourvières (Haut-Doubs) dimanche 4 novembre 2018 <image recadrée>
<image recadrée>
PommeCourvières (Haut-Doubs) dimanche 4 novembre 2018 Cardère
Pies sur une Aubépine Courvières (Haut-Doubs) dimanche 4 novembre 2018 Courvières (Haut-Doubs) dimanche 4 novembre 2018 Dans le dernier
rayon du soleil
<image recadrée>
Courvières (Haut-Doubs) dimanche 4 novembre 2018
Cachée <image recadrée> Tout près ! Portrait d'une Pie (dans le pommier !) Courvières (Haut-Doubs) lundi 5 novembre 2018 <image recadrée> Sans queue ! Courvières (Haut-Doubs) lundi 5 novembre 2018 Courvières (Haut-Doubs) lundi 5 novembre 2018 Pas de [TN] la semaine prochaine ! ... ni celle d'après ! A Bientôt |
"Aujourd'hui, dans un angle au-dessus du poêle à bois, une magnifique araignée domestique mouchetée de brun et d'or était en train de muer. Une araignée grandit en changeant de peau, qui lui tient lieu également de squelette. Mon araignée est restée tranquillement dans son coin hier, rassemblant ses forces et mal à son aise, je suppose, car j'ai lu que, durant la mue, la pression sanguine des araignées augmentait. Il lui a fallu presque toute la matinée pour s'extirper de son ancienne peau et maintenant elle est suspendue à côté, se reposant des efforts fournis, qui ont dû être considérables. Son ancienne peau commence à se friper, impalpable d'aspect et si petite qu'on se demande comment la nouvelle araignée a pu tenir dedans. Elle est assez grosse, près d'un centimètre et demi de diamètre, mais moins qu'une autre araignée domestique aperçue dans la cuisine, et elle a certainement d'autres mues à subir avant d'avoir atteint sa taille définitive. La mue est une solution au problème posé par la croissance – pas la mienne, certes, mais ce n'en est pas moins une solution. Les biologistes aiment à souligner que la croissance de l'intérieur vers l'extérieur est l'une des caractéristiques qui distinguent l'être vivant des choses inanimées. Les cristaux, qui ne sont pas vivants, grandissent, mais par un phénomène d'accrétion où la matière s'ajoute à celle déjà existante. Les êtres humains et autres mammifères, qui ont les parties molles de leur corps accrochées à un squelette, n'ont pas à affronter les problèmes de croissance de créatures telles que les insectes – les sauterelles ou les abeilles de mes ruches – ou les araignées (qui ne sont pas des insectes, mais des arachnides). La croissance présente certe des difficultés, mais ce ne sont pas les mêmes. Araignées, sauterelles et abeilles – ainsi que les homards, d'ailleurs – portent leurs squelettes à l'extérieur et ainsi, lorsqu'ils sont trop à l'étroit, ils doivent trouver un moyen de les éliminer. Nombre d'insectes subissent en muant une métamorphose, un changement radical et complet de leur ancienne forme. Mais les araignées sortent simplement de leur squelette, se livrant à cette opération deux à vingt fois avant d'atteindre leur taille définitive, tout en gardant relativement la même forme. Les bébés araignées, contrairement à la plupart des bébés insectes, ressemblent à des adultes, mais en plus petit. Un soir en allumant dans mon chalet, j'ai trouvé une mère araignée-loup, ou lycose, dont le dos était couvert de bébés. La plupart des araignées ne s'intéressent guère à leur progéniture, mais les araignées-loups transportent la leur avec elles partout où elles vont. Lorsque les petites araignées émergent de l'oeuf, elles grimpent sur le dos de leur mère et se cramponnent à elle. Celles que j'observais, des miniatures parfaites et délicates, étaient fort turbulentes et semblaient poser bien des problèmes à leur mère. Elles lui rampaient sur les yeux et elle était obligée de les écarter. Elles se bousculaient entre elles et plusieurs dégringolèrent à terre et se ruèrent vers ses pattes pour les escalader et retrouver la sécurité de son dos. L'araignée-loup et l'araignée domestique sont toutes deux relativement grosses ; un squelette extérieur impose des limites mécaniques à la taille d'un corps pour qu'il puisse fonctionner normalement. Mais d'autres araignées, même plus grosses, abondent dans mon jardin ; les épeires noires et jaunes, qui tissent des toiles caractéristiques formées, dirait-on, de fermetures à glissières. Ce sont des araignées brillantes luisantes, élégantes de lignes et, là-bas dans mon jardin, elles piègent les sauterelles qui mangent mes tomates. Elles tissent des cocons autour des insectes et les stockent jusqu'à ce qu'elles en aient besoin, comme d'économes ménagères remplissant leur garde-manger. C'est une façon de gagner sa vie que j'approuve sans réserve, le genre de choses qui nous fait considérer les araignées comme utiles tout en condamnant les sauterelles comme nuisibles. Je dois reconnaître que je n'ai pas été tellement ravie un jour en découvrant une épeire noire et jaune qui avait tissé sa toile devant une de mes ruches et avait garni son garde-manger personnel d'abeilles soigneusement emballées, qui s'étaient prises dedant en rentrant chez elles, lourdement chargées de nectar. Je détruisis la toile et portai l'araignée sur un buisson où j'espérais lui voir trouver des aliments qui lui plairaient tout autant, ce qui me satisferait encore plus. Les araignées tisseuses de toile n'ont pas très bonne vue, selon nos critères. Elles sont ellement myopes que lorsque les mâles viennent leur faire la cour, ils font vibrer les fils de la toile de la femelle pour prévenir de leur arrivée afin de ne pas être pris pour un mets de choix. Je doute donc que l'épeire de la ruche ait pu me voir quand je l'ai déplacée. En un sens c'était bien dommage, car malgré toutes les différences qui existent entre nous, nous avons un point commun d'importance. Nous sommes toutes deux des apicultrices ; toutes deux, nous gagnons notre vie grâce aux abeilles. Ma méthode, comparée à la sienne, semble excessivement byzantine. Je dorlote les abeilles d'un bout de l'année à l'autre, je leur prends le surplus de leur miel, le distille, le mets en bocaux et l'emporte à New York avec mon camion pour le vendre chez Bloomingdale, et ensuite j'utilise le chèque obtenu pour acheter ce dont j'ai besoin. Elle se contente de manger les abeilles. Nous sommes toutes deux des amalgames animés de produits chimiques communs à tous les êtres vivants : carbone, hydrogène, oxygène, azote, soufre et phosphore. Toutes deux sommes confrontées à une série de problèmes posés par notre chimie et notre sensibilité propre, entre autres comment grandir et comment gagner notre vie. Ce sont là de grandes questions et comme c'est souvent le cas avec les Grandes Questions, nous avons trouvé des réponses différentes – des réponses qui à leur tour différentes – des réponses qui à leur tour diffèrent de celles de l'abeille, amalgame chimique similaire et dont nous dépendons toutes deux pour gagner notre vie. Les solutions de l'abeille ont davantage à voir avec la métamorphose et le nectar des fleurs, et ce sont également de bonnes réponses. Vivre dans un monde où les réponses aux questions peuvent être si nombreuses et si valables, voilà ce qui me fait sortir du lit et enfiler mes bottes tous les matins..."
Sue
Hubbell - Une année à la campagne (Vivre
les questions)
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