Le Trochiscanthe nodiflore
[TN]
n°627 (2018-27)
mardi 3 juillet 2018
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
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lettre : [ici]
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Grive litorne La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 8 avril 2018 La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 8 avril 2018 <image recadrée>
Sur son nid... à la fourche de deux branches
de Frêne... Pinson des arbres mâle La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 8 avril 2018 Rougequeue
noir mâle Etang de l'Entonnoir à Bouverans (Haut-Doubs) dimanche 8 avril 2018 Etang de l'Entonnoir à Bouverans (Haut-Doubs) dimanche 8 avril 2018 <image recadrée> Toujours sur son nid... La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 15 avril 2018 Pinson des
arbres femelle Fauvette à
tête noire femelle
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 15 avril 2018 Grive
litorne
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 15 avril 2018 Toilette
<image recadrée> Rougequeue
noir mâle
A la chasse !La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 15 avril 2018 <image recadrée> <image recadrée> <image recadrée>Portrait
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 15 avril 2018
Mésange bleue, sur fond de Grive litorne <image recadrée> Sittelle
torchepot
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) samedi 12 mai 2018 Entrée
Provision
d'insectes...
<image recadrée> <image recadrée> Au petit
matin
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) samedi 12 mai 2018 Chardonneret
élégant Pinson des
arbres mâle A la recherche d'insectes, dans l'herbe
Mésange
bleue Pinson des
arbres mâle
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) samedi 2 juin 2018
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Suggestion de
lecture : "
Ilona avait lancé cette question tandis qu'elle somnolait encore, assise d'aplomb sur sa chaise de cuisine, enveloppée dans son châle. Elle qui sentait d'habitude rouler dans ses veines un sang de quinine, tinter ses ossements de fer, fléchissait tout à coup, prise d'une fatigue lourde comme un poids attaché aux chevilles. Une petite vieille affaissée, c'est ce à quoi elle ressemblait. Dans la pénombre, les rides accentuées redessinaient les contours de son visage. Elle se redressa, honteuse de son assoupissement, et reprit d'une voix enrouée :
Mina ne répondit pas. Elle se tenait derrière Ilona, la taille ceinturée de ses bras maigre, les épaules relevées jusqu'à la naissance des oreilles. Elle portait un pull rayé blanc et noir, en laine angora, qui recouvrait son buste menu. Le corps de Mina, toujours frémissant de froid, était délicat, aux proportions miniatures, poupée aux membres de bois et aux articulations de fer. Les jambes étaient galbées, mais amaigries par les jeûnes incessants, de même pour la poitrine, minuscule boîte thoracique. Mina avait hérité de la qualité de peau de sa mère. Et elle resplendissait comme sa mère, du moins jusqu'à la naissance de la nuque. Passé ce cap, la tête figurait une apparition révoltante. Non pas que Mina fût laide de naissance, des traces de sa beauté passée subsistaient dans l'arc des sourcils, rescapés de sa manie de s'arracher fil à fil toutes ses toisons, et dans le magnifique orbe de son oeil, pourtant privé de cils et fardé de cernes noirs comme le trou d'une mine. Le visage de Mina était ravagé par une gale roussâtre. De son père supposé, elle tenait cette chevelure crépue, noire comme un jet d'encre, qui lui consumait le crâne à la manière d'une ombre enflammée. Mais le maintien de fée n'appartenait qu'à elle. Ilona se leva en ajustant son châle sur ses épaules et se frotta les paupières. Elle quitta sa chaise et fit face à sa fille, qu'elle contempla quelques instants tandis que Mina gardait les yeux baissés.
Mina secoua la tête.
Ilona se raidit. A cette seule inflexion, il devint clair que Mina savait. Elle chercha le regard de sa fille, pour le sonder, sans y parvenir. Mina se dérobait. Aussitôt Ilona eut honte de lui avoir caché le message de Gleb.
Mina haussa les épaules.
Ilona reçut le coup sans broncher, accoutumée aux reproches de sa fille.
Mina hésita. La douceur de sa voix butait sur une fatalité épuisante.
Ilona secoua la tête.
Ilona baissa les yeux. Délivrer Mina du bordel où Gleb la tenait recluse n'avait servi à rien : les éclaboussures de sang teignant les murs, les balles mouchetant les poitrines, les bras, les visages, l'odeur de poudre et de chairs blessées. Tant de sang versé pour une liberté dont Mina ne voulait pas. Un an s'était écoulé entre la disparition de Mina à Marseille et sa délivrance à Londres. Une année entière, Mina était restée enfermée par Gleb, livrée à la perversité, attachée, vendue, martyrisée. Enceinte, elle avait été privée de soin, affamée, humiliée. Son enfant, à peine né, lui avait été enlevé. Comment comprendre que ces blessures répétées ne feraient qu'exhausser l'amour de sa fille pour son bourreau ? Comment effacer ces outrages, rentre Mina à sa véritable nature ? Ilona avait perdu trop de temps à la chercher, de fausses pistes en guet-apens, elle avait laissé Mina croupir sur son lit de douleur et sa culpabilité n'aurait jamais de fin. - Je t'accompagnerai, ptchelita. Accorde-moi cela, au moins."
Emmanuelle
Caron - Tous les âges me diront
bienheureuse
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