Le Trochiscanthe nodiflore
[TN]
n°576 (2017-27)
mardi 4 juillet 2017
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
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Couple La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 30 avril 2017 <image recadrée> Dans le "Frêne aux Sittelles" <image recadrée> Seul La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 30 avril 2017 Courvières (Haut-Doubs) jeudi 25 mai 2017 jeudi 25 mai 2017
Courvières
(Haut-Doubs)
vendredi 26 mai 2017 Coquelicot La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) samedi 27 mai 2017 La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs) dimanche 28 mai 2017 La
Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
Courvières
(Haut-Doubs)dimanche 28 mai 2017 samedi 3 juin 2017 Au lever du soleil
<image recadrée>Courvières (Haut-Doubs) samedi 3 juin 2017 Ebouriffé ! Courvières (Haut-Doubs) samedi 3 juin 2017 <image recadrée>
Courvières
(Haut-Doubs)samedi 3 juin 2017 <image recadrée> <image recadrée>
Courvières
(Haut-Doubs) Courvières (Haut-Doubs) samedi 3 juin 2017 <image recadrée> Crépide
bisannuelle lundi 5 juin 2017 lundi 5 juin 2017 lundi 5 juin 2017 <image recadrée> Crépide
bisannuelle- Crepis
biennis
Face à face
Courvières (Haut-Doubs) dimanche 11 juin 2017
Courvières
(Haut-Doubs)
dimanche 11 juin 2017 (matin) Courvières
(Haut-Doubs)
Courvières
(Haut-Doubs)dimanche 11 juin 2017 (après-midi) dimanche 11 juin 2017 (après-midi) Courvières
(Haut-Doubs)
dimanche 11
juin 2017 (après-midi)
<image recadrée>
Dans les Salsifis...
Courvières (Haut-Doubs) dimanche 18 juin 2017 (après-midi) Pour regarder, ou cliquez [ici] <Pas de son...> Dans les Salsifis
(des prés)...
<image recadrée>
le Chardonneret se nourrit des graines toutes fraîches... Courvières (Haut-Doubs) dimanche 18 juin 2017 (après-midi) <image recadrée>
<image recadrée>
Courvières
(Haut-Doubs)
<image recadrée>dimanche 18 juin 2017 (après-midi) Courvières (Haut-Doubs) dimanche 18 juin 2017 (après-midi) Dans le
Pommier
Courvières (Haut-Doubs) dimanche 18 juin 2017 (après-midi)
Avec un pied d'Absinthe...
dans le jardin Courvières (Haut-Doubs) dimanche 25 juin 2017 Courvières
(Haut-Doubs)
Crépide bisannuelledimanche 25 juin 2017 Crépide bisannuelle - en fin de floraison Courvières
(Haut-Doubs)
Sur un fildimanche 25 juin 2017 <image recadrée> Courvières
(Haut-Doubs)
Cul par dessus
Tête !dimanche 2 juillet 2017 <image recadrée> ça gratte...
(au fond, une Hirondelle rustique, mâle, passe...) <image recadrée> Devant le cimetière...
Courvières (Haut-Doubs) dimanche 2 juillet 2017
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"7 Angel One Même si on le trouvait souvent au coin de la maison, assis sur un chaise de cuisine jaune écaillé, occupé à surveiller la route, ce n'était pas ainsi que Mooshum passait ses journées mais simplement une pause pour délasser ses vieux membres noueux. Mooshum se fatiguait avec entrain en s'adonnant à une interminable série de travaux coutumier qui changeaient au fil des saisons. En automne, bien sûr, il y avait les feuilles à ratisser. Elles arrivaient de partout pour se poser sur son carré d'herbe rabougrie. Parfois il les saisissait même entre le pouce et l'index et les jetait dans un tonneau. Il prenait plaisir à les brûler. Il y avait une brève interruption après les feuilles et avant que la neige tombe. Pendant ce temps-là, Mooshum mangeait comme un ours. Son ventre s'arrondissait et ses joues se gonflaient. Il se préparait pour les fortes neiges. Il possédait deux pelles. Une large en plastique bleu qu'il utilisait pour la poudreuse, et une argentée au bord tranchant pour la neige qui s'était tassée ou amoncelée. Il avait aussi un casse-glace, un outil ressemblant à une binette dont la lame descendait tout droit au lieu de se courber. Il l'aiguisait avec une lime jusqu'à ce qu'elle soit aussi tranchante qu'elle aurait pu facilement couper un orteil. La tenue de combat de Mooshum attendait dans l'entrée à l'arrière de la maison tout le mois d'octobre. Quand tombait la première neige, il enfilait ses galoches. Clémence avait collé aux semelles du papier de verre à très gros grains. Tous les deux ou trois soirs, elle changeait le papier et laissait les chaussures sécher sur le radiateur. Les galoches de Mooshum allaient par-dessus ses mocassins doublés de fourrure de lapin et ses chaussettes isolantes. Il portait un pantalon de travail doublé de flanelle rouge, et une doudoune orange fluo que Clémence lui avait offerte pour qu'on le retrouve au cas où il se perdrait dans la neige. Des moufles en peau d'élan doublées de lapin, et un bonnet de laine d'un bleu lumineux surmonté d'un pompon fuchsia achevaient cet équipement. Mooshum sortait tous les jours dans ses vêtements hauts en couleur et travaillait avec une férocité croissante. On aurait dit une fourmi, il paraissait à peine bouger. Pourtant il ouvrait à la pelle des pistes menant aux poubelles, dégageait les sentiers qui tournaient autour de la maison, mais déblayait aussi l'allée de bout en bout et chaque côté des marches montant à la galerie. Il raclait la neige jusqu'à la terre et au ciment et ne la laissait jamais s'accumuler. Quand il n'y avait pas de neige fraîche et rien que l'éclat de la glace, il taillait celle-ci à l'aide du casse-glace fatal. Durant la période où tout fondait mais où la terre ne pouvait pas encore être travaillée pour faire le jardin, il mangeait de nouveau sans arrêt, et regagnait la chair qu'il avait perdue au cours de sa guerre hivernale. Le printemps et l'été c'était les mauvaises herbes qui poussaient avec un empressement vicieux, les animaux chapardeurs, les insectes, les vicissitudes du climat. Mooshum se servait de la tondeuse à main comme la plupart des gens de son âge se serviraient d'un déambulateur, n'empêche qu'il tondait le jardin à ras. Il entretenait un grand potager avec un zèle invisible, arrachant le chiendent, l'amarante à racines rouge, et trimballant des tonnes de seaux d'eau pour les buttes des courges, une fois de plus sans jamais paraître bouger. Le jardin de fleurs ne l'intéressait pas, mais Clémence avait un carré de framboisier revenu à l'état sauvage qui se mêlait à un bosquet d'amélanchiers. Quand les baies commençaient à mûrir, Mooshum se levait à l'aube pour les défendre. Epouvantail vivant, il était assis sur sa chaise jaune et buvait son thé du matin à petites gorgées. Pour effrayer les oiseaux, il avait également installé une corde à linge garnie de couvercles de boîtes de conserve. Il les avait percés à l'aide d'un marteau et d'un clou et les avait attachés assez près les uns des autres pour qu'ils claquent au vent. Il fixait ces fils cliquetants partout dans le jardin, et je prenais toujours bien garde de noter où il les tendait car le bord était tranchant et un garçon qui passerait par là à vélo sans trop y prêter attention risquerait d'avoir la gorge tranchée. Grâce à cette activité incessante et apparemment chimérique, Mooshum restait en vie. A quatre-vingt dix ans passés, on l'avait opéré de la cataracte et ses gencives racornies avaient été équipées de fausses dents. Il avait encore l'oreille fine. Il entendait tellement bien qu'il était incommodé par les trépidations périodiques de la machine à coudre de Clémence, au bout du couloir, et l'habitude qu'avait mon oncle Edward de fredonner des hymnes funèbres en corrigeant ses copies. Un matin dans la chaleur du mois de juin, je suis allé chez eux à vélo. Il a entendu ma bicyclette quand j'étais encore sur la route, mais bon, j'avais fixé une carte à jouer à un rayon au moyen d'une pince à linge. J'amais ce joyeux claquement, et puis l'as de carreau portait chance. N'importe qui aurait pu m'entendre, pourtant à ce moment-là personne n'aurait été plus heureux que Mooshum de me voir arriver. Car il s'était pris dans un grand bout de filet à oiseaux qu'il avait tenté de jeter sur le buisson de pimbina, même si les fruits étaient loin d'être mûrs..."
Louise
Erdrich - Dans le vent du silence
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