Le Trochiscanthe
nodiflore [TN]
n°521 (2016-21)
mardi 24 mai 2016
"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres
Sauvages"
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Dans un Sureau Bouverans (Haut-Doubs) dimanche 20 mars 2016 Dans un Noisetier Bouverans (Haut-Doubs) samedi 30 avril 2016 Chant
Dans un Prunellier Bouverans (Haut-Doubs) jeudi 5 mai 2016 <image recadrée> <image recadrée> Toilette <image recadrée> Pour regarder, ou cliquez [ici] <pas de son !> Pour regarder et écouter, ou cliquez [ici] <avec du son !, cette fois-ci !!> <image recadrée> <image recadrée>
...envol Pour regarder et écouter, ou cliquez [ici] <avec du son !, cette fois-ci !!> Toilette II <image
recadrée>
Dans un
TrembleBouverans (Haut-Doubs) lundi 16 mai 2016 Pour regarder et écouter, ou cliquez [ici] <avec du son !, désolé pour les parasites !!> Chant
Bouverans (Haut-Doubs) lundi 16 mai 2016 <image recadrée> |
"39 La mer était couverte de brume quand il sortit sur le pont. L'homme de quart fumait à l'avant, près du cabestan. Il se leva en entendant les pas. Il cacha le mégot dans son dos, puis toussa à se déchirer la poitrine. Tobiasson-Svartman gagna une des chaloupes, déroula l'échelle de corde et descendit. L'homme de quart, qui reprenait son souffle après sa quinte de toux, lui demanda d'une voix coupée s'il avait besoin d'un rameur. Il lui fit signe que non. Le soleil n'avait pas encore pointé à l'horizon quand il commença à ramer vers Halsskär. Les tolets gémissaient à fendre l'âme. Il souquait ferme. Pour arriver droit sur l'îlot, il prit pour point de repère le coin tribord de la passerelle, et n'eut ensuite pluis besoin de corriger sa trajectoire. Il accosta au même endroit que la fois précédente. L'îlot d'Halsskär semblait avoir été aplati par une main géante. De la terre s'était accumulée dans les crevasses et les replis du terrain, donnant prise à des plantes grasses et à quelques touffes d'absinthe. Le long des rochers rampaient des lichens et les taches rouge sombre des bruyères. Il suivit le rivage vers le nord. Quand la pente des rochers devenait trop raide, il lui fallait s'écarter de l'eau pour trouver un passage. Le terrain lui opposait une résistance tenace, les rochers glissants se transformaient en précipices : à peine arrivait-il à bout d'une paroi qu'une autre venait lui barrer la route. En dix minutes, il fut en sueur. Seul entre des blocs de pierre, tout au fond d'une crevasse d'où il ne voyait plus la mer. Cerné par la pierre. Au fond du ravin, il trouva la peau qu'un serpent avait abandonnée en muant. Il continua à grimper parmi les rochers, la mer réapparut, et il déboucha au bord d'une crique qui semblait taillée à la hache dans la masse de l'îlot. Il s'arrêta net. Au loin, dans la crique, s'avançait un ponton vermoulu où une barque de pêche était amarré. Sa voile était retroussée autour d'un mât planté très en proue. Près du rivage, des filets pendaient à des fourches dont les piquets étaient coincés avec des pierres. Il y avait aussi un gros tonneau de chêne goudronné, un tas de pierres de lest et de flotteurs en écorce de bouleau ou en liège. Il se figea, aux aguets. Etonné qu'un îlot situé aux confins de l'archipel soit utilisé par des pêcheurs ou des chasseurs d'oiseaux. Il ne pouvait pas s'agir de chasseurs de phoques : aucun de ces rochers à fleurs d'eau que fréquentent les phoques gris n'existait à proximité du phare de Sandsänka. Il longea le rivage jusqu'à la barque, et remarqua qu'elle était bien entretenue. La voile enroulée autour du mât n'était pas rapiécée, les cordages étaient intacts. Les filets pendus aux fourches étaient en mailles fines, donc destinés aux harengs. Tout au fond de la crique, un sentier bien marqué conduisait à des broussailles épaisses d'aubépines et de ronces. Le sentier serpentait ensuite entre deux rochers. Soudain, il vit une tache plus claire d'un terre-plein où une petite cabane de chasse se blotissait contre une paroi rocheuse. Un filet de fumée s'échappait d'une cheminée maçonnée. La maison était assise sur des pierres grossières, ses murs faits de petites blanches de largeurs inégales, non rabotées. Sur le toit, la mousse couvrait une couche de tourbe. Il n'y avait qu'une seule fenêtre. La porte était fermée. Un petit potager jouxtait la maison. Il n'y poussait rien pour le moment mais quelqu'un s'était donné la peine de retourner la terre et d'y épandre du varech en guise d'engrais. Plus loin, contre la paroi rocheuse, de l'autre côté de la maison, s'étalait un champ de pomme de terre. Il en estima la surface à vingt mètres carrés. Là aussi, on avait épandu du varech, mêlé à des fanes de pommes de terre séchées. C'est alors que la porte s'ouvrit. Une femme sortit, une hache à la main. Elle portait une jupe grise et une blouse chiffonnée, ses cheveux blonds étaient noués en une longue tresse qui disparaissait sous la blouse. Elle le vit et poussa un cri. Mais elle n'avait pas peur et ne leva pas la hache. Tobiasson-Svartman était confus. Sans savoir pourquoi, il se sentait pris la main dans le sac. Touchant la visière de sa casquette, il salua. - Je n'avais pas l'intention de venir en cachette, dit-il. Je m'appelle Lars Tobiasson-Svartman, je suis capitaine, je viens du navire qui mouille là-bas, à l'est de l'îlot. Elle avait les yeux clairs et soutenait son regard. - Qu'est-ce que vous fabriquez ? J'ai vu le bateau. Ça fait des jours qu'il est là. - Nous mesurons le fond pour voir si les cartes marines sont fiables..."
Henning
Mankell - Profondeurs
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