Le Trochiscanthe nodiflore [TN]

n°520 (2016-20)

mardi 17 mai 2016

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
explications sur le nom de cette lettre : [ici] ou [ici]
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Maurice Ravel - Ma Mère l'Oye
Le jardin féerique

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A l'affût d'une famille de
Renards

Vuillecin (Haut-Doubs)
dimanche 8 mai 2016



Ambiance forestière,
au matin (7 h 40, je me suis installé vers 7 h 15)...
Vuillecin (Haut-Doubs)
dimanche 8 mai 2016


Sortie d'un Renardeau (8 h 12)

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Sieste d'un Renardeau
<image recadrée>

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Vue sur le terrier

Ombre du feuillage sur le tronc d'un Hêtre

Le retour d'un Blaireau adulte (un peu tardif : à 10 h 11 !!)
Je n'ai eu que le temps de faire cette image !...

Frondes de Fougère

Fin de la sieste !

A la découverte du monde !

"Fatal error - click annul"

ça gratte !

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A quoi rêve un Renardeau ?




La Renarde

Le bruit du déclencheur de mon appareil
l'interpelle...
(11 h 20)


Inquiète, elle rentrera tout de même dans le terrier...
<image recadrée>

Renardeau : entre ombre et lumière

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Baîllement

Tout près !

Camouflage

Renardeau baîllant
<image recadrée>

<image recadrée>

Au même moment, un Epervier (mâle) s'est posé sur cette souche !
mais je n'ai pas eu le temps de le photographier...

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Fin de l'affût : il est presque midi (11 h 47)

Vue sur le terrier (11 h 00)
cherchez le Renardeau !

Ma Tente-affût l'interpelle...

Pour terminer, un petit voyage dans le temps (!) :
c'est ma première image de Renard (scan d'un tirage sur papier...),
prise en juin ou juillet 1990
(il y a 26 ans !!) sur le même terrier
Chercher la Renarde !!
(au centre de l'image...)


Pour revoir d'autres images,
de Renards,
sur le même terrier (en 1997 et en 2006)
cliquez sur les images ci-dessous



Livret virtuel  :

 Renard et Renardeaux
à Vuillecin

Cliquez sur les images

ou [ici]

pour le consulter

Cliquez sur la couverture pour l'ouvrir, puis au coin du bas de chaque
page afin de les faire tourner,
vous pourrez écouter un extrait d'une oeuvre musicale,
ou agrandir les images
(en cliquant sur "agrandir l'image")

Attention, c'est une animation au format "flash"
qui peut prendre du temps à télécharger !

Adresse du livret virtuel :

[http://www.pascal-marguet.com/livretrenard/]




Suggestion de lecture :

"Le soleil faisait craquer les derniers et tardifs bourgeons des chênes sous la pression chaude de ses rayons. Les verdures se nuançaient à l’infini.

C’était une symphonie de couleur allant du cri violent des verts ardents et comme vernissés (réfléchissant le soleil sur les mille facettes de leurs miroirs comme pour jouer avec la plaine) aux pâleurs mièvres des rameaux inférieurs, dont les feuilles tendres, aux épidermes délicats et ténus, n’avaient pas encore reçu le baptême ardent de la pleine lumière, bu la lampée d’or des rayons chauds, car leur oblique courant n’avait pu combler jusqu’alors que les lisières privilégiées et les faîtes victorieux.

Mais ce jour-là une vie multiple et grouillante, végétale et animale, sourdait de partout, des crépitements des insectes et du chant des oiseaux à l’éclatement des bourgeons et au gonflement des rameaux, craquant dans l’air vibrant comme des muscles qui s’essaient.

C’était un de ces premiers jours où la forêt, comme une femme qui a longtemps résisté, se laisse enfin aller toute aux caresses de l’amant, où elle vit de toutes ses fibres, où elle chante de toutes ses sèves, où les grands baisers du soleil l’ont investie comme un amour victorieux et conquise et pénétrée toute, et où elle ne tend plus aux vivants sous ses ombrages captieux l’asile traître de son insidieuse fraîcheur.

Tout chantait en elle, mais sans rejaillir au dehors, tout y vivait d’une vie chaude et contenue, comme concentrée…

C’était parmi cette joie plénière qui semblait l’épanouir que Fuseline, ce matin, visitait les nids de merles des coudriers et des petits chênes pour sa repue quotidienne.

À la fourche d’un arbre où trois branches de moyenne grosseur nouaient leurs fibres ligneuses, enfoncé à ras de son nid, aplati sur les frêles corps à peine duvetés et rougeâtres de ses petits, un merle frissonnait éperdument, les plumes ébouriffées, la tête molle, les yeux hagards.

Un vertige fantastique semblait le dominer, une peur indescriptible tourbillonnait dans ses yeux.

Loin, en haut, comme suspendu dans la lumière, un oiseau de proie, un grand rapace l’avait découvert et, les ailes agitées perpétuellement sans bouger de place, le cou tendu, la tête penchée, fascinait de ce mouvement vain et du regard hallucinant de ses yeux fixes cerclés d’or la malheureuse bestiole, incapable maintenant de fuir le nid où le sentiment maternel l’avait fait rester malgré le danger.

Au loin, dans un immense froufroutement d’ailes, un ample et frémissant pépiement, les autres oiseaux se rassemblaient pour, par leur nombre, leurs cris, leur influence réciproque, échapper à la fascination fatale et à l’assassinat infaillible auxquels sont voués les isolés. Des corbeaux se répondaient, et, encore hésitants, se désignaient l’ennemi, avec à la fois le désir et la crainte d’affronter des coups qui ne les menaçaient pas.

L’oiseau de proie, un grand busard d’une envergure fantastique, ne semblait y prendre garde, absorbé tout entier par sa proie.

Et, tout à coup, sentant le merle bien pris dans le réseau de sa puissance, il s’abattit comme une masse sur le nid.

Mais au moment où ses serres crochues, tendues en avant dans un geste assassin, allaient saisir l’oiseau, brusquement, semblant surgir des profondeurs même de l’arbre, la tête menaçante de Fuseline se leva.

Un balancement d’ailes rejeta le rapace sur une branche de la fourche où l’y fixa une serre, tandis que l’autre se crispait dans le vide, et que, sur le cou tendu, la tête horizontale fixait férocement l’adversaire qui lui disputait son butin.

Sur la branche d’en face, le train de derrière en haut, la patte valide en bas, grasse et forte de ses festins répétés, les reins arqués en une courbe féline et puissante, le cou levé pour le défi, elle dressait en face du busard sa petite tête fine où brasillaient les diamants de ses yeux, sa tête plate de bête féroce montrant dans la gueule ouverte pour mordre et pour saigner la double rangée brillante et pointue de ses dents, immobile, les babines troussées, le nez froncé, les pointes des moustaches tendues en avant, terrible, dans la suprême intensité de sa colère et de sa haine.

Et les deux adversaires, face à face se poussaient jusqu’à l’âme les lances violentes de leurs regards tous deux fascinateurs et féroces. La lutte imminait, poignante, indécise encore, mais implacable et mortelle pour cette pâture jetée entre les deux, ce malheureux corps d’oiseau aux plumes ébouriffées d’un fiévreux et fantastique frisson, cette petite boule grise dont on ne voyait plus qu’un bec noir immobile, des yeux vagues et fous, et dont le cou semblait vouloir rentrer dans le corps pour échapper à la griffe qui l’étranglerait ou à la dent qui le saignerait ; pauvre loque vivante et souffrante dont sautait le cœur de violents battements qui faisaient pépier sous la frêle toiture de ses ailes les jeunes oisillons aveugles, inconscients du drame qui se déroulait au-dessus de leur tête.

Les regards des deux ennemis se froissaient comme des épées ; on eût dit qu’un lien invisible et tout puissant les rivait l’un à l’autre et que ce lien, se contractant progressivement, bandait par degrés leurs muscles pour la lutte, le bond fatal où ils allaient se saisir de toutes leurs forces centuplées par la colère qui les animait.

Brusquement, comme si ses muscles fussent emplis de toute leur énergie batailleuse et résistante, d’un élan violent de ses reins et de ses jarrets, Fuseline sembla se décocher de sa branche comme une flèche de haine et fonça sur le rapace.

L’élan fut irrésistible ; l’oiseau de proie reçut le choc en plein poitrail et chancela ; mais ses ailes fantastiques l’eurent redressé en une seconde et avant même que son bec crochu eût lacéré dans ses cisailles cette chair frémissante, ses serres agrippantes saisissaient Fuseline par le râble et il s’enlevait dans l’espace, emportant la bête avec lui.

Le busard s’éleva obliquement, alourdi de sa capture, réservant sa vengeance pour plus tard, dans quelques instants, quand la fouine étourdie de cette course, éperdue de vertige, chavirée dans la mer aérienne, ne songerait plus à résister à ses coups de bec.

Il se trompait. Fuseline avait bien, en s’élevant aux serres sanglantes du fauve, éprouvé le vertige de ceux qui ne se fient qu’à la terre et à leurs pattes ; son regard éperdu n’avait pu sonder l’abîme grandissant qui la séparait de son monde, mais une colère frénétique l’avait saisie, et, plus puissante et plus souple que jamais, comme si les muscles de ses reins, forçant sans point d’appui les serres qui la tenaillaient, eussent progressé d’eux-mêmes, elle rapprochait progressivement du poitrail de l’oiseau sa gueule ardente et vorace.

D’un seul coup, dans un effort convulsif et désespéré, courbant les pattes du busard, elle avait atteint le corps et, tels des couteaux inarrachables, lui avait planté violemment dans les flancs les lames froide de ses dents.

Du geste d’un humain frappé à mort, le rapace jeta fébrilement en arrière sa tête douloureuse, tandis que, par la blessure ouverte, suintait le sang rouge, en rosée écarlate et chaude d’abord, puis en jets plus vifs et saccadés, s’abîmant en gouttes larges au fur et à mesure que progressait la morsure et que se trouait le cœur.

Alors modifiant son vol et s’élevant tout droit, sans plus rien voir, dans un essor fou, l’oiseau monta, monta, Fuseline enfoncée dans son cœur comme une flèche de mort qu’il serrait de plus en plus furieusement dans les contractions frénétiques de son agonie.

Les serres convulsées, crispées sur les reins et le poitrail de la fouine, traversèrent la peau, les chairs, broyant sous leur étreinte les poumons, le cœur, tous les viscères qui saignèrent, se triturèrent comme une pâte de chair vivante et fumante, tandis qu’implacable, immobile, rivée sur sa vengeance elle aussi, la tête de Fuseline creusait encore plus avant un trou plus rouge dans le flanc de l’oiseau.

Ils montèrent fous dans le soleil, en une ascension éperdue, jusqu’à ce que, tout d’un coup, vidé, ployant sur ses ailes flasques, le grand oiseau chavira sur l’abîme, et, dans les derniers sursauts de l’agonie, étreignant encore entre ses serres rigides le corps de sa victime, les deux cadavres s’abîmèrent dans le vide."


Louis Pergaud - De Goupil à Margot
(La Fin de Fuseline)



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