Le Trochiscanthe nodiflore [TN] n°475 (2015-26)

mardi 30 juin 2015

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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WA Mozart - Symphonie n° 25 K 183

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Héron cendré

au repos
Pontarlier (Haut-Doubs)
mai et juin 2015


L'oeuf !
  Pontarlier (Haut-Doubs)
  jeudi 14 mai 2015

"Je reste à l'abri pendant les heures centrales qui écrasent même les ombres à terre.
La lumière a un poids, à l'aube c'est de l'aluminium, au couchant c'est du cuivre, au milieu c'est du plomb."


Au dessus du barrage sur le Doubs

Il faut s'imaginer que je suis au bord
d'une "rocade" (quelques milliers de véhicules
y passent tous les jours !)
Parfois un pièton s'arrête pour me demander
si le héron est sur son nid. Si je vois
les petits !!

"Il s'affranchit des cauchemars et des visions en les répandant parmi les autres."

Pontarlier (Haut-Doubs)
samedi 30 mai 2015

Dans les joncs

Héron clignant de l'oeil

"Cette nuit, je suis du papier buvard, l'obscurité m'imprègne de son encre."

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<il n'y a pas de son...>

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"Allongé sur la plage, je revoie Le Caire sur le plafond. J'ignore sa langue,
pas l'arabe mais l'astronomie. Je suis un analphabète d'étoiles et d'univers."

Baîllement

Héron se grattant

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"Les nuits sans lune brouillent le tas de mes souvenirs, elles enflent les pensées
d'un homme qui vit plus à l'écart qu'ensemble."

Toilette

Couple de Canard colvert

Colvert mâle s'étirant

Pontarlier (Haut-Doubs)
jeudi 4 juin 2015

"La vie compte sur le multiple, chacun est l'exemplaire d'une immensité qui est gaspillée."

Toilette sous l'aile

En position du Lotus,
afin d'aérer le dessous des ailes...

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Baîllement II

Comme il fait chaud, l'oiseau "halète"
rapidement afin d'évacuer la chaleur...
Pontarlier (Haut-Doubs)
jeudi 4 juin 2015

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Toilette sur l'aile
Pontarlier (Haut-Doubs)

jeudi 4 juin 2015

Essorage !

<image recadrée>

<image recadrée>

Pontarlier (Haut-Doubs)
jeudi 4 juin 2015

Le [TN] prend une pause la semaine prochaine !
Je suis en congé...

A bientôt !


Pour voir d'autres images de Héron
(au même endroit !),
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(ou sur chaque [numéro])

[numéro 429]
(2014 - 30)

Héron, Grèbe, Corneille et Cie, au bord de l'eau
Haut-Doubs - printemps 2014

Texte : Le Fils du vent - Henning Mankell

Musique : Cantate BWV 131 - JS Bach

mardi 5
août
2014
[numéro 444]
(2014 - 45)

Au bord de l'eau - Haut-Doubs - fin de l'été 2014

Texte :  L'ivraie, l'ivresse et le bon grain - La Garance voyageuse n°52

Musique : Cantate bwv 42 - JS Bach

mardi 25
novembre
2014


Bieszczady - la forêt sauvage
 
images de

Bisons, Loups, Lynx et Ours...


par Alain Létévé (ami des Hautes-Alpes)

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Suggestion de lecture :

"Je suis monté sur la terrasse pour assaisonner mes tomates gorgées de jus et de soleil absorbé.

Je reste à l'abri pendant les heures centrales qui écrasent même les ombres à terre.La lumière a un poids, à l'aube c'est de l'aluminium, au couchant c'est du cuivre, au milieu c'est du plomb.
De la terrasse, j'attends sa descente violacée sur l'île de Patmos.

D'ici, je crois entendre le délire de Jean qui a enfermé là-bas les symboles furieux de l'Apocalypse dans vingt-deux chapitres.

Harcelé par des sons, des voix, des nombres, par le sept répété dix-neuf fois, par des bêtes, des dragons, des anges et de faméliques figures féminines, il s'en libéra en les écrivant.
On s'affranchit des cauchemars et des visions en les répandant parmi les autres. Il parvint ensuite à dormir, lisse et vidé comme un coquillage sur la plage.

Le coucher de soleil derrière son île est un écroulement de lumière qui se brise en éclats.

Tous les soirs, le ciel éructe au-dessus de Patmos et dans la mer.
A cette heure-là, je bois à la santé de l'Apocalypse, avec un vin froid et une tasse d'olives noires. Je célèbre le Sud que j'ai devant moi, derrière mes pieds allongés.

Dès que la première planète s'allume, je prépare le dîner.

A l'heure où je me couche d'habitude pour dormir, je descends cette nuit-là vers la petite crique pour rencontrer Irène.

Sa voix qui ne passe pas par des cordes vocales et par des lèvres fond dans mon écoute comme le fait un nuage avec sa pluie. Je ne tombe pas sous le charme, je reste attentif comme le spectateur d'un magicien qui fait sortir des pièces d'une main vide, des colombes d'un cylindre.
Je descends vers la crique en clopinant, à cause de mon nerf sciatique. Je ris de moi en pensant à Jacob qui lutta la nuit avec un ange et resta boiteux de la hanche.

Je n'ai pas voulu de lumière, j'avance à pas incertains avec l'appui d'une canne.

Je descends en chantonnant une vieille chanson, née en mer sans auteur ni écriture, chantée et transmise oralement :

« E nata miez'o mare Michelemmà, Michelemmà »*

Au rythme boitillant de ma canne, je suis le sentier dans le noir et j'arrive à la petite plage, la dernière strophe à la bouche : « Pe'fa'muri'gli amanti, Michelemmà, Michelemmà. »*

Au dessus de ma tête, s'est ouverte la concurrence des étoiles, leur marché lumineux.

Au milieu, passe un grand boulevard, une voie saumâtre plus que lactée, un trafic d'amas.
Tout autour est disséminé le dense assortiment d'années-lumière. On dirait des points fixes, mais ce sont en fait des flux d'énergie brillante lancée en voyage, à la plus légendaire des vitesses.

Mes pupilles ouvertes reçoivent leur course effrénée au milieu du vide.

Etendu au-dessous, je vois des faubourgs éclairés. Par le hublot d'un avion, j'ai vu ainsi le premier rivage de l'Afrique, Le Caire.

J'allais en Tanzanie où les nuits divisent le jour en parts presque égales. De l'avion, Le Caire était un ciel nocturne renversé sur terre.

J'avais une trentaine d'années, je laissais derrière moi le vide d'une communauté dissoute. Elle fut de plusieurs milliers, puis brusquement il devint même dangereux de se saluer à un coin de rue.

Dans des fourgons aux vitres blindées, certains de ceux qui avaient été arrêtés par les carabiniers passaient de leur côté et dénonçaient leurs camarades pour obtenir une autre vie en échange.

C'était le commerce de sa propre vie en échange de celle d'autrui. Ils recevaient une nouvelle identité et une nouvelle conscience.
Les mains dans les poches, sans répondre au salut de ceux qui m'appelaient par mon nom à haute voix, je me retirais avec notre variété suspecte.

Une fois dissous notre destin commun, ses membres allaient en tenter un autre privé.

J'avais devant moi l'Afrique, gigantesque et ramassée dans l'enceinte d'un petit village, qui la représentait et qui la contenait aussi.

Personne ne dirait qu'il est allé en Amérique s'il a seulement vécu dans une petite ville de l'Idaho. Avec l'Afrique, c'est différent.
Ceux qui y sont allés et se sont arrêtés dans un coin, même le plus petit, peuvent dire qu'ils y ont vécu.

Je parlais alors le kiswahili, une langue qui ignore le verbe avoir, soucieuse de distinguer dans sa grammaire les êtres humains, les animaux et les choses.

Dans un village de Tanzanie, ont coulé sur moi les nuits les plus noires et les plus sonores de la vie passée avec moi-même.

Bruissements, cris, appels, grognements, le violon perpétuel des moustiques qui transmettaient au sang les fièvres de la malaria, le souffle en pleine face des chauves-souris, les termites qui mangèrent Dostoïevski, Le Joueur et l'Idiot, et qui pour moi coïncident avec lui.

Au cours d'une nuit grecque, le crachat sonore de l'Afrique et de ma vie trente ans plus tôt revient remplir mon écoute.
Les histoires que j'écris ensuite de mémoire s'empêtrent dans les osselets de mon oreille interne.
Cette nuit, je suis du papier buvard, l'obscurité m'imprègne de son encre.

Allongé sur la plage, je revois Le Caire sur le plafond. J'ignore sa langue, pas l'arabe mais l'astronomie. Je suis un analphabète d'étoiles et d'univers.

De ces coins -là et dans les archipels voisins, un millions de nuits avant celle-ci, quelqu'un apprit à lire à vue le libellé du firmament.
Il sut les confins du système solaire et s'arrêtant à Saturne, il calcula les cycles d'éclipses et de comètes, avant même d'aller au-delà de Gibraltar.

Avant d'explorer la planète, on visita la nuit illustrée du Sud.

Anaximandre de Milet construisit une horloge solaire. Puis, il trouva des coquillages sur les montagnes et supposa que la Terre était en train de chasser la mer. Il n'était pas à la portée de l'imagination de l'époque de deviner que c'était au contraire la surface émergée qui prenait de la distance en se soulevant.

Philolaos comprit que la Terre n'était pas centrale dans la machine de l'univers, essayant d'ébranler en vain notre prétention à être les benjamins de la Création.

Hipparque de Nicée répertoria huit cent cinquante étoiles classées selon six grandeurs.

Les astronomes étaient des sentinelles sur les tours de guet, ils repéraient des essaims et des caravanes sur la piste du cirque nocturne.

Les nuits sans lune brouillent le tas de mes souvenirs, elles enflent les pensées d'un homme qui vit plus à l'écart qu'ensemble.

Je retire de ma nuque la protection de mes mains, je laisse le sable entrer dans mes cheveux. Mes plantes de pied reçoivent la chatouille de la mer.

C'est cette nuit qu'Irène doit accoucher. Les muscles expulseurs, l'absence de lune, la mer qui l'enveloppe comme un châle, poussent tous ensemble.
Je ne suis le père de personne, il ne m'est pas arrivé de m'imaginer dans une salle d'attente. Cette nuit, je m'y trouve.
J'entends son tranquille affairement. Les naissances de mammifères sont rares dans son étendue secrète. La mer est le gigantesque réservoir des oeufs, innombrables, déposés par chaque poisson.
La vie compte sur le multiple, chacun est l'exemplaire d'une immensité qui est gaspillée.
Il en est ainsi également pour ceux de la terre ferme, mais en mer le grouillement vivant est plus effréné, plus avide de bonne fortune.
En parent éloigné, convoqué cette nuit dans une salle d'attente blanchie aux étoiles, je pense : bonne chance à Irène et à sa créature qui naît et vient en surface..."

Erri de Luca - Histoire d'Irène

*Elle est née au milieu de la mer Michelemmà, Michelemmà.

Pour faire mourir ses amants, Michelemmà, Michelemmà.



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