Le Trochiscanthe nodiflore [TN] n°444 (2014-45)

mardi 25 novembre 2014

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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JS Bach - Cantate BWV 42
Aria "Wo zwei und drei versammlet sind"

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Au bord de l'eau...
(à la fin de l'été)

Haut-Doubs
juillet, août et septembre 2014

  Cygne tuberculé
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
  mercredi 23 juillet 2014

Etirement
(Cygne en mue : en train de changer de plumage...)
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

  mercredi 23 juillet 2014

Toilette
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

  mercredi 23 juillet 2014

Double
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

  mercredi 23 juillet 2014

Famille de Foulque macroule
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

  mercredi 23 juillet 2014

Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
  mercredi 23 juillet 2014

Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
  mercredi 23 juillet 2014

Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
  mercredi 23 juillet 2014



Sous la pluie...
Ornans (Doubs)
dimanche 3 août 2014

Canard colvert
Ornans (Doubs)
dimanche 3 août 2014

Ornans (Doubs)
dimanche 3 août 2014

Colvert, au repos
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

dimanche 17 août 2014

Foulque macroule
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

samedi 20 septembre 2014

Colvert s'étirant
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 20 septembre 2014



Colvert femelle
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 20 septembre 2014

La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 20 septembre 2014

La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 20 septembre 2014

Couple de Cygne tuberculé
  Bouverans (Haut-Doubs)
samedi 20 septembre 2014


Famille de Cygne tuberculé
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
dimanche 21 septembre 2014

Jeune Cygne tuberculé
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
dimanche 21 septembre 2014

Cygne tuberculé adulte et jeune
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
dimanche 21 septembre 2014

A la recherche de nourriture
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
dimanche 21 septembre 2014

Jeune Grèbe huppé
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

dimanche 21 septembre 2014

Grèbe huppé adulte
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

dimanche 21 septembre 2014

Grèbe huppé, nourrissage
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

dimanche 21 septembre 2014

Grèbe huppé s'ébrouant
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
dimanche 21 septembre 2014

Grèbe huppé s'ébrouant
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
dimanche 21 septembre 2014

Héron cendré, au repos
Pontarlier (Haut-Doubs)
dimanche 28 septembre 2014

Reflet du Héron cendré
Pontarlier (Haut-Doubs)
dimanche 28 septembre 2014

Héron cendré,  à sa toilette
Pontarlier (Haut-Doubs)
dimanche 28 septembre 2014

Héron cendré,  baîllant
Pontarlier (Haut-Doubs)
dimanche 28 septembre 2014

Héron cendré
Pontarlier (Haut-Doubs)
dimanche 28 septembre 2014



Petit texte :

"L’ivraie, l’ivresse et le bon grain

Associée à un champignon parasite, l’ivraie enivrante nous fait remonter aux sources de l’ivresse…

Une graminée associée aux céréales, l’ivraie enivrante (Lolium temulentum L.), a connu un passé riche et mouvementé. L’homme a découvert les effets psychotropes de l’ivresse (le nom « ivraie » vient du latin populaire ebriaca qui signifie « plante qui enivre ») avec cette plante, avant celle procurée par le vin, d’apparition plus tardive. Ses propriétés psychotropes sont bien connues : délire, troubles visuels et « transports furieux ». Elles sont dues à l’alcaloïde nommé tumeline, en référence au nom botanique latin de l’espèce temulentumqui est en état d’ivresse, imbibé »). Elle a été mélangée au cannabis, en Égypte, pour en doper les effets. Un géologue ayant séjourné au Kurdistan, m’a assuré que l’ivraie était encore consommée pour ses propriétés dans les années 1950, dans une sorte de fièvre du samedi soir dénuée de rites.

Mais les symptômes de l’intoxication comportent aussi : « des céphalées, des vertiges, le tremblement de la langue, de la gêne dans la prononciation, la déglutition et la respiration, de la somnolence, des douleurs, de l’angoisse précordiale, des vomissements, de la diarrhée ou inversement de la constipation, une sueur froide sur tout le corps et surtout un tremblement général, avec souvent des contractions spasmodiques, des convulsions douloureuses, la prostration avec parfois une raideur tétanique » (P. Fournier).

L’autre nom de cette plante, souvent utilisé sans en connaître l’origine, est : la zizanie (du grec : zizanion qui est d’origine sémite). « Semer la zizanie » c’est jeter le trouble au sens figuré. Bien que, semer l’ivraie dans le champ du voisin fut bien, au sens propre, semer la zizanie et chercher le bâton pour se faire battre. Ne pas confondre avec la zizanie aquatique d’Amérique du Nord et d’Asie (Zizania aquatica L.) qui est consommée sous le nom de riz sauvage et quelquefois commercialisée en mélange avec différents riz (grains noirs très longs et minces).

De nombreux noms vernaculaires ont été utilisés pour la désigner : irague dans les Landes, iraka en basque, judiou, juef, juî en provençal, jol en langue d’oc, leu en Bourgogne, draog en breton, jocou en Vendée, fenasse en Savoie, grem en Velay et enràdje dans les Pyrénées atlantiques.

Les pains amers

La présence d’ivraie, mélangée dans les stocks de céréales puis dans la farine, gêne la levée de la pâte et donne au pain obtenu une saveur âcre et une couleur grisâtre. Les animaux domestiques comme les chevaux et les moutons sont très sensibles à l’intoxication. Les chats paraissent être peu affectés. Les porcs et les vaches comme les poules et les canards ne sont pas affectés par ces désordres. Le criblage des céréales était employé pour se soustraire à ses méfaits. Les écarts de tri obtenus permettaient d’engraisser les volailles. D’autres graines de messicoles étaient retirées des céréales grâce à cette pratique : celles qui gâtaient la farine en lui donnant une teinte rougeâtre et un mauvais goût comme le blé des vaches (Melampyrum arvense L.) ou toxiques comme la nielle des blés (Agrostemma githago L.) ou le brome faux-seigle (Bromus secalinus L.).

Certains caractères de l’ergot de seigle se retrouvent chez l’ivraie : le mimétisme et la toxicité. Ce mimétisme est exprimé par la taille de sa graine assez grosse qui échappe facilement au tri rudimentaire des céréales et par son cycle de croissance et de développement identique aux céréales cultivées (germination automnale et maturation estivale des graines). C’est une messicole (messi : « moisson » en latin et cole : « habitat »), raide et robuste, aujourd’hui très raréfiée, qui héberge souvent un champignon parasite responsable à lui seul des effets toxiques (Acremonium lolii). Ce champignon appartient à l’ordre des Clavicipitales comme l’ergot de seigle. Sa forme sexuée n’a jamais été observée, seul le mycélium est présent. Une sous-espèce d’ivraie enivrante accompagnait autrefois les cultures de lin, souple et grêle comme lui (Lolium temulentum subsp. linicola (A. Braun)Berher). D’autres Lolium sont présents en France : le ray-grass italien (Lolium multiflorum Lam), le ray-grass anglais (Lolium perenne L.) qui sont des fourragères et l’ivraie raide (Lolium rigidum Gaudin) une adventice que l’on rencontre souvent dans les cultures.

Et l’homme créa l’ivraie…

L’ivraie enivrante n’existe pas dans les milieux non cultivés. C’est une mutation probable d’une espèce sauvage originaire de la zone de domestication des céréales (Lolium persicum). La présence du champignon a peut-être été le facteur ayant permis sa mutation. L’homme a joué le rôle d’élément de conservation et de diffusion pour cette espèce mutante. En effet, comme pour la plupart des céréales cultivées, elle n’est pas viable sans l’intervention humaine de la récolte et du semis. Il y a eu co-évolution entre l’ivraie et les céréales domestiquées. On retrouve les éléments majeurs et communs qui ont conduit à leur sélection :

- un rachis (axe qui supporte les épillets) non brisant, ce qui a pour effet d’éviter la chute des graines lors de la maturité, mais présente un handicap très fort, dans le milieu naturel, pour une espèce annuelle dont le but des graines est la dispersion maximum dans l’espace,

- l’épaississement de la tige et l’acquisition d’une plus grande solidité,

- le grossissement des épis, des épillets et des graines,

- l’absence de dormance, toutes les graines semées germent dès leur mise en terre,

- et donc, la nécessité du prélèvement par l’homme pour les céréales cultivées et l’ivraie qui, en l’absence de récoltes, germent sur pied (comme la nielle des blés chez qui l’on retrouve ce phénomène de co-évolution et le particularisme de son absence du milieu naturel).

Longtemps, les hommes, dont Pline bien sûr, mais aussi Théophraste et plus tard Matthiole, ont regardé la zizanie comme une dégénérescence des blés et des orges. Mais à cette époque le transformisme battait son plein, une charogne donnait un essaim d’abeilles. Pour l’ivraie, l’effet était réversible, croyait-on. Elle pouvait, quittant son statut malfaisant et maléfique, redevenir l’année suivante une céréale.

Un des premiers agronomes français, Olivier de Serres, qui s’est inspiré quelquefois des agronomes latins, a vu, lui aussi, dans l’ivraie un transfuge du froment : « J’ai moi-même esgrené un espi de froment, dans lequel se treuverent quelques grains d’yvroie : qui ne faict que révoquer en doute le dégénérer du froment, semée en bonne saison, provient quelques fois du froment de belle monstre : mais retenant du naturel de l’yvroie, il rapporte la malice d’icelle au pain qui en est faict, causant mal de teste à ceux qui en mangent : en outre, que ce froment semé, produit de l’yvroie et non du froment. » (Olivier de Serres, Le Théâtre d’Agriculture et Mesnage des champs, 1600).

Ce qui confère à la similitude de l’ivraie aux céréales toute la force de cette transformation potentielle et plus pratiquement, à notre époque, la fameuse co-évolution qu’elle suggère.

Le bien et le mal

La parabole « il faut séparer le bon grain de l’ivraie » tirée des Évangiles et développée par Saint Matthieu « L’ivraie ce sont les fils du Malin ; l’ennemi qui l’a semée, c’est le Diable » représente, outre l’interprétation théologique, peut-être plus une lutte contre un système qu’une prévenance alimentaire qui n’a pas toujours bien franchi le temps. Bosc, botaniste au siècle dernier, signale : « J’ai pu remarquer dans un de ces cantons [Haute Bourgogne] que l’habitude [de l’ivraie] leur rendait l’usage de ce pain moins dangereux, car les cultivateurs paraissaient bien portants, tandis qu’un seul déjeuner, pris chez l’un d’eux, me troubla la tête et m’affaiblit pendant plusieurs jours. » L’histoire ne dit pas si ses inventaires floristiques furent affectés d’une soudaine fantaisie.

Des graines d’ivraie enivrante ont été retrouvées en grand nombre dans des sites préhistoriques et des tombeaux égyptiens (2500 ans avant J.-C.) et dans ce dernier cas la présence du champignon parasite a été attestée. Trois interprétations sont possibles pour expliquer la présence de ces graines :

- exceptionnellement indemnes du champignon, elles sont collectées pour la consommation alimentaire,
- parasitées par le champignon, donc toxiques ou altérant la qualité de la nourriture, elles sont écartées des lots de céréales. Dans ce cas, la précaution annoncée par le christianisme est caduque, l’homme de l’Ancien Empire pratique déjà le principe de sécurité alimentaire,

- parasitées par le champignon, elles sont écartées des lots de céréales et consommées pour les effets particuliers qu’elles occasionnent sur la perception et sur la conscience.

De rites en héritage

On peut penser à une pratique de rites païens que les religions chrétiennes ont tenté d’éliminer pour mieux s’implanter, mais en les remplaçant et en les sublimant par un autre attribut symbolique aux effets similaires : le vin. Le grand changement a été aussi la limitation à un officiant exclusif, à la place de toute une assemblée. Reconnu et autorisé, le prêtre célèbre seul le rite par la consommation d’un produit destiné à imager le lien avec le divin. Le mélange de céréales ergotées et envahies d’ivraie enivrante a bien dû se produire quelquefois dans le passé pour donner une mixture détonante et stupéfiante, une sorte de pain qui a frappé l’esprit, qui l’a tourmenté et qui a laissé femmes et hommes dans des béatitudes insondables ou des chevauchées d’équipages d’Apocalypse.

On dirait aujourd’hui dans un langage branché, imagé et un tantinet réducteur, peut-être comme dans ces « rave parties » où l’on s’agite énormément : un pain qui vous met le feu.

[...]

Ce jour-là, Jésus sortit de la maison et s’assit au bord de la mer. Et des foules nombreuses s’assemblèrent auprès de lui, si bien qu’il monta dans une barque et s’assit ; et toute la foule se tenait sur le rivage. Et il leur parla de beaucoup de choses en parabole.

Parabole du semeur

Il disait : « Voici que le semeur est sorti pour semer. Et comme il semait, des grains sont tombés au bord du chemin, et les oiseaux sont venus tout manger. D’autres sont tombés sur les endroits rocheux où ils n’avaient pas beaucoup de terre, et aussitôt ils ont levé, parce qu’ils n’avaient pas de profondeur de terre ; mais une fois le soleil levé, ils ont été brûlés et, faute de racine, se sont desséchés. D’autres sont tombés sur les épines, et les épines ont monté et les ont étouffés. D’autres sont tombés sur la bonne terre et ont donné du fruit, l’un cent, l’autre soixante, l’autre trente. Entende qui a des oreilles ! »

Dans la Bible (Évangile selon Saint Matthieu 13)

Parabole de l’ivraie

Il leur proposa une autre parabole : « il en va du Royaume des Cieux comme un homme qui a semé du bon grain dans son champ. Or, pendant que les gens dormaient, son ennemi est venu, il a semé à son tour l’ivraie, au beau milieu du blé, et il s’en est allé. Quand le blé est monté en herbe, puis en épis, alors l’ivraie est apparue aussi. S’approchant, les serviteurs du propriétaire lui dirent : « Maître, n’est-ce pas du bon grain que tu as semé dans ton champ ? D’où vient donc qu’il s’y trouve de l’ivraie ? ». Il leur dit : « C’est quelque ennemi qui a fait cela ». Les serviteurs lui disent : « Veux-tu donc que nous allions la ramasser ? ». « Non, dit-il, vous risqueriez, en ramassant l’ivraie, d’arracher en même temps le blé. Laissez l’un et l’autre croître ensemble jusqu’à la moisson ; et au moment de la moisson je dirai aux moissonneurs : ramassez d’abord l’ivraie et liez-la en bottes que l’on fera brûler ; quant au blé, recueillez-le dans mon grenier "

La Bible de Jérusalem, Ed. Zodiaque, 1994

Pierre SELLENET - La Garance Voyageuse n° 52



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