Le Trochiscanthe nodiflore [TN] n°336 - Mardi 25 septembre 2012

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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Aperçu de l'exposition

Bach et les oiseaux
(Lac de Saint-Point, Haut-Doubs)

samedi 22 septembre 2012

à La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

Merci pour votre visite !



JS Bach -
Cantate BWV 19 (Es Erhub sich ein Streit)

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Hermine, Bouquetins et Renard
août et septembre 2012
Lac de Saint-Point, Mont d'Or (Haut-Doubs), Creux du Van (Suisse)

Hermine sur une barque
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
samedi 4 août 2012

Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
samedi 4 août 2012

Repos
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

samedi 4 août 2012

Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
samedi 4 août 2012

En équilibre...
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

samedi 4 août 2012

Dans l'ombre
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

samedi 18 août 2012

Emergence entre deux rochers
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

samedi 18 août 2012

Attentive
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

samedi 18 août 2012

La troupe, sur l'alpage
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

Jeune femelle
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

Creux du Van (Suisse)
dimanche 9 septembre 2012

Creux du Van (Suisse)
dimanche 9 septembre 2012

Jeune mâle
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

Creux du Van (Suisse)
dimanche 9 septembre 2012

Jeune de l'année, au repos (dans l'ombre)
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

Etagne (femelle) au repos
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

Descente dans la falaise !
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

Creux du Van (Suisse)
dimanche 9 septembre 2012

Etirement
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

ça gratte !
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

Toilette
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

Jeune mâle (un autre), au repos
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

Le saut !
Creux du Van (Suisse)

dimanche 9 septembre 2012

Rencontre dans la falaise...
Mont d'Or (Haut-Doubs)
samedi 15 septembre 2012

... un jeune renard (à proximité d'un abri sous-roche)
Mont d'Or (Haut-Doubs)

samedi 15 septembre 2012

Il m'observe sans trop comprendre
(il ne doit voir que la lentille de l'objectif !)
Mont d'Or (Haut-Doubs)

samedi 15 septembre 2012

A l'arrière : c'est un Nerprun des Alpes (Rhamnus alpina)!
Il coexiste avec son cousin : le Nerprun des rochers (Rhamnus saxatilis),
un arbrisseau plus petit et plus rare !
Mont d'Or (Haut-Doubs)

samedi 15 septembre 2012

Il retourne dans l'abri sous-roche
(et regarde au-dessus, les touristes qui discutent...)
Mont d'Or (Haut-Doubs)

samedi 15 septembre 2012



Petit texte :

"C'est un endroit où il n'y a personne, personne. Il n'y a que l'homme bleu du désert qui la regarde continuellement, sans lui parler. Lalla ne sait pas bien ce qu'il veut, ce qu'il demande. Elle a besoin de lui, et il vient en silence, avec son regard plein de puissance. Elle est heureuse quand elle est sur le plateau de pierres, dans la lumière du regard. Elle sait qu'elle ne doit pas en parler, à personne, pas même à Aamma, parce que c'est un secret, la chose la plus importante qui lui soit arrivée. C'est un secret aussi parce qu'elle est la seule qui n'ait pas peur de venir souvent sur le plateau de pierres, malgré le silence et le vide du vent. Seul, peut-être, le berger chleuh, celui qu'on appelle le Hartani, vient lui aussi quelquefois sur le plateau, mais c'est quand une des chèvres du troupeau s'est égarée en courant le long des ravins. Lui non plus n'a pas peur des signes sur les pierres, mais Lalla n'a jamais osé lui parler de son secret.

C'est le nom qu'elle donne à l'homme qui apparaît quelquefois sur le plateau de pierre. Es Ser, le Secret, parce que nul ne doit savoir son nom.

Il ne parle pas. C'est-à-dire, qu'il ne parle pas le même langage que les hommes. Mais Lalla entend sa voix à l'intérieur de ses oreilles, et il dit avec son langage des choses très belles qui troublent l'intérieur de son corps, qui la font frissonner. Peut-être qu'il parle avec le bruit léger du vent qui vient du fond de l'espace, ou bien avec le silence entre chaque souffle du vent. Peut-être qu'il parle avec les mots de la lumière, avec les mots qui explosent en gerbes d'étincelles sur les lames des pierres, les mots du sable, les mots des cailloux qui s'effritent en poudre dure, et aussi lés mots des scorpions et des serpents qui laissent leurs traces légères dans la poussière. Il sait parler avec tous ces mots-là, et son regard bondit d'une pierre à l'autre, vif comme un animal, va d'un seul mouvement jusqu'à l'horizon, monte droit dans le ciel, plane plus haut que les oiseaux.

Lalla aime venir ici, sur le plateau de pierre blanche, pour entendre ces paroles secrètes. Elle ne connaît pas celui qu'elle appelle Es Ser, elle ne sait pas qui il est, ni d'où il vient, mais elle aime le rencontrer dans ce lieu, parce qu'il porte avec lui, dans son regard et dans son langage, la chaleur des pays de dunes et de sable, du Sud, des terres sans arbres et sans eau.

Même quand Es Ser ne vient pas, c'est comme si elle pouvait voir avec son regard. C'est difficile à comprendre, parce que c'est un peu comme dans un rêve, comme si Lalla n'était plus tout à fait elle-même, comme si elle était entrée dans le monde qui est de l'autre côté du regard de l'homme bleu.

Alors apparaissent les choses belles et mystérieuses. Des choses qu'elle n'a jamais vues ailleurs, qui la troublent et l'inquiètent. Elle voit l'étendue de sable couleur d'or et de soufre, immense, pareille à la mer, aux grandes vagues immobiles. Sur cette étendue de sable, il n'y a personne, pas un arbre, pas une herbe, rien que les ombres des dunes qui s'allongent, qui se touchent, qui font des lacs au crépuscule. Ici, tout est semblable, et c'est comme si elle était à la fois ici, puis plus loin, là où son regard se pose au hasard, puis ailleurs encore, tout près de la limite entre la terre et le ciel. Les dunes bougent sous son regard, lentement, écartant leurs doigts de sable. Il y a des ruisseaux d'or qui coulent sur place, au fond des vallées torrides. Il y a des vaguelettes dures, cuites par la chaleur terrible du soleil, et de grandes plages blanches à la courbe parfaite, immobiles devant la mer de sable rouge. La lumière rutile et ruisselle de toutes parts, la lumière qui naît de tous les côtés à la fois, la lumière de la terre, du ciel et du soleil. Dans le ciel, il n'y a pas de fin. Rien que la brume sèche qui ondoie près de l'horizon, en brisant des reflets, en dansant comme des herbes de lumière - et la poussière ocre et rose qui vibre dans le vent froid, qui monte vers le centre du ciel.

Tout cela est étrange et lointain, et pourtant cela semble familier. Lalla voit devant elle, comme avec les yeux d'un autre, le grand désert où resplendit la lumière. Elle sent sur sa peau le souffle du vent du sud, qui élève les nuées de sable, elle sent sous ses pieds nus le sable brûlant des dunes. Elle sent surtout, au-dessus d'elle, l'immensité du ciel vide, du ciel sans ombre où brille le soleil pur.

Alors, pendant longtemps, elle cesse d'être elle-même ; elle devient quelqu'un d'autre, de lointain, d'oublié. Elle voit d'autres formes, des silhouettes d'enfants, des hommes, des femmes, des chevaux, des chameaux, des troupeaux de chèvres ; elle voit la forme d'une ville, un palais de pierre et d'ar­gile, des remparts de boue d'où sortent des troupes de guerriers. Elle voit cela, car ce n'est pas un rêve, mais le souvenir d'une autre mémoire dans laquelle elle est entrée sans le savoir. Elle entend le bruit des voix des hommes, les chants des femmes, la musique, et peut-être qu'elle danse elle-même, en tournant sur elle-même, en frappant la terre avec le bout de ses pieds nus et ses talons, en faisant résonner les bracelets de cuivre et les lourds colliers.

Puis, d'un seul coup, comme dans un souffle de vent, tout cela s'en va. C'est simplement le regard d'Es Ser qui la quitte, qui se détourne du plateau de pierre blanche. Alors Lalla retrouve son propre regard, elle ressent à nouveau son cœur, ses poumons, sa peau. Elle perçoit chaque détail, chaque pierre, chaque cassure, chaque dessin minuscule dans la poussière.

Elle retourne en arrière. Elle redescend vers le lit du torrent asséché, en faisant attention aux pierres coupantes et aux buissons d'épines. Quand elle arrive en bas, elle est très fatiguée, par toute cette lumière, par le vide du vent qui ne cesse jamais. Lentement, elle marche sur les chemins de sable jusqu'à la Cité, où les ombres des hommes et des femmes bougent encore. Elle va jusqu'à l'eau de la fontaine, et elle baigne son visage et ses mains, à genoux par terre, comme si elle revenait d'un long voyage..."

JMG le Clézio - Désert



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