Le Trochiscanthe nodiflore [TN] n°292 - Mardi 15 Novembre 2011

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
explications sur le nom de cette lettre : [ici] ou [ici]
Si cette page ne s'affiche pas correctement, cliquez [ici]


Ludovico Einaudi -
I Giorni

Pour regarder et écouter,
cliquez sur la flèche au bas de l'image...

 



ou cliquez [ici]



Le "Roi des Chamois"
(images du rut)

La Cluse et Mijoux (Haut-Doubs)
mardi 1er novembre 2011

La harde sur le versant est, au petit matin.

Le "Roi" poursuit une femelle de la harde...

"Le rut s'étend sur le mois de novembre et le début de décembre. Du rut, je n'ai longtemps vu que les poursuites des boucs entre eux, le plus souvent à la descente, par bonds immenses. Parfois celui qui domine le troupeau s'approche d'une femelle, la tête haute, la crinière hérissée et ondulant. La chèvre se tient curieusement accroupie et se dérobe lorsqu'il arrive à quelques mètres. Bien des gardes que j'ai questionnés n'ont jamais vu de saillie..."

Robert HAINARD - Mammifères sauvages d'Europe

Autres attitudes du rut...

Femelle et jeune.

Vue sur la harde et le "Roi" (couché à droite)

Femelle âgée se grattant.
Celle qui guide la harde est appelée "bréhaigne".

Femelle et son jeune de l'année se reposant.
<image recadrée>

Crinière hérissée !

Au repos (il va quitter cette place pour suivre la harde, partie plus loin).

La harde broute de nouveau (sur un versant plus ensoleillé).

Arrivée du "Roi"

Dans la harde, il y a toujours un individu attentif...

Banc I : la femelle

Banc II : le mâle

Couché dans l'herbe

Etirement

Sieste

La harde continue de brouter.

Le "Roi" rejoint la harde...



Petit texte :

"Ce matin de novembre, il se réveilla fatigué et sut que c'était la dernière saison de sa suprématie. Ses cornes allaient se rendre face à celles d'un de ses fils plus résolu. Il avait déjà dû en blesser un au ventre, sans aller plus loin, un qui piaffait. Un d'entre eux répandrait ses boyaux sur l'herbe et il ne serait plus qu'une carcasse vaincue et vidée. Il ne devait pas finir ainsi, mieux valait disparaître cet hiver-là, et qu'on ne le retrouve pas.
Il ne dormait pas avec le troupeau, pas même pendant l'automne de l'accouplement. Il avait plusieurs refuges pour la nuit, sous des pins de montagne creux, dans des grottes sur de hauts rochers friables où ni l'homme ni son odeur ne pouvaient monter. Il descendait vers la harde à des heures différentes, avec le brouillard, avant l'aube, après le coucher du soleil. Il ne donnait à personne la chance de le prévoir. A son arrivée, les femelles allaient à sa rencontre et les jeunes mâles pliaient le genou pour s'incliner.

Ce jour de novembre, le roi reconnut son déclin. Son coeur battait à moins de deux cents coups minute, cette poussée qui donne de l'oxygène aux élans en montée et les rend plus légers.
Les sabots des chamois sont les quatre doigts d'un violoniste. Ils vont à l'aveuglette sans se tromper d'un millimètre. Ils giclent sur des à-pics, jongleurs en montée, acrobates en descente, ce sont des artistes de cirque pour le public des montagnes. Les sabots des chamois s'agrippent à l'air. Le cal en forme de coussinet sert de silencieux quand il veut, sinon l'ongle divisé en deux est une castagnette de flamenco. Les sabots des chamois sont quatre as dans la poche d'un tricheur. Avec eux, la pesanteur est une variante du thème, pas une loi.
Il les posa à l'aube dans un brouillard épais à ne pas voir le sol, et les trouva mal assurés. Aussi attendit-il que son coeur pousse ses battements jusqu'à la pointe de ses ongles et que le jour croisse en même temps que les coups. Il ne voulait pas céder, baisser sa corne gauche devant un mâle plus jeune, aux forces seulement plus neuves.
Il flaire l'horizon pour savoir où ne jamais plus revenir, ni se laisser surprendre. Le jour au franc soleil sécha vite le brouillard, un ruisseau de lumière, venant de l'est, parcourait le troupeau qui s'y abreuvait, museaux levés. Ils étaient bien des mètres au-dessous de lui. De son abri à l'ombre, il en vit la force, la quantité, qui supporte les pertes. Ils n'étaient pas courageux, ils étaient nombreux, valeur qui donne de la force aux plus faibles.
C'étaient ses fils, sortis des poussées de ses flancs. Il n'en était pas fier, il avait fait ce que voulait la vie. Ils pouvaient s'exposer en pleine lumière.

Braves femelles qui mettent bas au mois de mai en montant sur les plus hauts pâturages. Elles accouchent dans la solitude, puis elles se mettent en groupe avec d'autres mères. Les petits grandissent dans des jardins d'enfants clôturés par les cieux et les ravins. Leurs cornes servent de bouclier contre les piqués de l'aigle, sans l'aide d'aucun mâle.
Braves femelles, chacune avec un marmot collé à son ombre et à ses mamelles. Le roi les surveillait de loin, heureux de voir naître plus de femelles que de mâles."

Erri De Lucas - Le poids du papillon



Voir la liste des anciens numéros du"Trochiscanthe nodiflore" (les archives) : cliquez [ici]

Site internet : Rencontres sauvages

Me contacter : pascal@pascal-marguet.com

Calendrier 2011 : Pour le télécharger directement au format pdf (1200 ko), cliquez [ici]

 

Pour vous désinscrire, vous pouvez m'envoyer un e-mail (en répondant à ce message) avec pour objet "désinscription",

ou en cliquant

[ici]

Pour partager cette page sur "FaceBook", cliquez sur le bouton ci-dessous :



Rejoignez-moi sur "FaceBook" en cliquant sur le lien suivant :

[http://www.facebook.com/marguet.pascal]