Le Trochiscanthe nodiflore [TN] n°250 - Mardi 18 janvier 2011

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
explications sur le nom de cette lettre : [ici]
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Article à propos de l'exposition (à Embrun),

sur le Dauphiné Libéré du 10 janvier 2011

Pour le lire, cliquez sur l'image ci-dessous :

 



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JS Bach - Cantate BWV 21 "Ich Hatte Viel Bekümmernis"

Pour regarder et écouter,
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Première sortie (aux Chamois)

La Cluse et Mijoux (Haut-Doubs)
samedi 15 janvier 2011

Crêtes embrumées.

Rencontre avec deux cabris (encore mouillés
de la pluie de la nuit !)

La brume, à l'assaut du Château de Joux.

La Combe.

Sur la crête, dans l'ombre.

Seslérie bleue (elle attend le printemps !)

Chamois femelle.

Mésange bleue
(sa cousine, la mésange charbonnière chante comme au printemps !!)
<image recadrée>

La harde, en train de brouter au soleil.

L'hiver leur laisse un peu de répit !

Soleil, sculpté sur une échauguette du Château de Joux.

Château de Joux et Fort Mahler (entre les deux, c'est la Cluse !)

N'oubliez pas de télécharger le calendrier de 2011,
sur le thème des Chamois :

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Petit texte :

"C'est une nuit très longue et belle, une nuit sans fin. Nous sommes au bord de la terre, au bout du monde. Sur notre radeau de basalte, nous glissons lentement vers la vie nouvelle, vers notre mère. Nous sommes enfants du rêve. Nous sommes libres, enfin, nos chaînes sont tombées.
Dans la nuit, des gens marchent le long du rivage. Des hommes portent du thé noir dans une grande théière de cuivre, et un verre. Chacun boit à son tour.
Surya boit d'abord, puis elle me tend le verre à moitié plein. Le thé est amer et tiède, mais je n'ai jamais goûté breuvage plus exquis. L'homme qui distribue le thé est grand et maigre, son visage à demi caché par un turban en haillons. A côté de lui je reconnais Uka, le balayeur, l'intouchable. Il tend le verre à thé à d'autres hommes, près de nous. J'entends des voix qui l'appellent, des rires. Il n'y a plus d'interdits. Cette nuit, tous les hommes sont devenus semblables, ils sont enfiévrés, ivres de soleil et de vent, leurs yeux brûlent et leur peau est couverte de cendres, comme la pierre sur laquelle ils sont couchés. Ils parlent tous la même langue, celle qui est au coeur, et qui n'a pas besoin de lèvres.
La nuit est longue et brillante, pleine de musique et de fumées.
Surya s'est couchée contre moi, je sens le mouvement doux de sa respiration, la chaleur de son corps. A un moment, je me suis levé, j'ai marché sur la plage, au milieu des feux. Quand je passe, des gens se retournent, je vois des visages, j'entends des paroles. Il y a des mains qui me touchent, des interrogations. Au-dessus de la baie des Palissades, les plantations sont noires, les palmes s'agitent dans le vent avec un grand bruit de froissement. Le volcan est invisible. Pour la première fois, il n'y a aucun feu sur le cratère, là où Véran montait sa garde. Cette nuit est douce, sans ennemi, sans effroi. J'entends le bruit des voix qui montent de la plage, de la musique, je sens l'odeur des feux. Nous partirons, l'île retournera à son état de nature. Dans les fourrés, autour de Palissades, il y a des craquements, des bruits de cavalcade. Les chiens redevenus sauvages rôdent et chassent les cabris dans le chaos de rochers. Bientôt ce sera leur monde.C'est une nuit ancienne, une nuit qui ressemble au commencement. La lumière des feux éclaire vaguement la case collective où nous avions passé la première nuit, dans la tempête. Tout cela est si loin, vague comme un rêve.
J'ai retrouvé dans ma poche, le morceau de fer rouillé que m'a donné Choto, lorsque je suis entré pour la première fois au village paria. Je ne sais pourquoi je l'ai gardé, comme un talisman. Tout ce qui s'est passé auparavant me semble maintenant irréel, une légende, une rumeur qui s'efface. J'ai la même certitude que les gens assis sur la plage, je ressens le même bonheur : tout doit être nouveau.

C'est une nuit infinie, chaque instant se confond à l'autre, comme s'il ne devait jamais y avoir de jour. Les flammes s'amenuisent, vacillent, repartent, avec cette couleur vert d'eau près des braises, et les tourbillons de fumée. Plus loin, le long de la plage, des feux se sont éteints, d'autres se sont allumés. Il y a des silhouettes qui vont et viennent, des hommes, des femmes, d'un foyer à l'autre. La voix qui chantait tout à l'heure s'est tue, puis voici qu'elle reprend, continuant le même chant, la même plainte. Dans le ciel au-dessus de nous les étoiles girent lentement. Sirius est près de l'horizon, le Seigneur Shukra s'est couché. Quand nous étions dans la grotte, je m'en souviens, Surya avait dessiné sur ma peau avec de la cendre l'image des sept Rishis qu'on voit au ras de l'horizon, et elle m'avait parlé aussi des Jinnats, et de la grande tache de payasa, le riz au lait des immortels. Cette nuit, c'est nous qui avons inventé des constellations sur la plage, comme si nous avions renversé l'univers. Alors nous dérivons lentement sur notre radeau de lave, dans la nuit, au hasard, les yeux brûlants à force de lire l'avenir dans les flammes..."

JMG Le Clézio - La Quarantaine



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