Le Trochiscanthe nodiflore [TN] n°194 - Mardi 24 novembre 2009

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
Si cette page ne s'affiche pas correctement, cliquez [ici]


Arrivée de la Reine de Sabba (Oratorio de Salomon)
Georg Friedrich Haendel

Pour écouter,
cliquez sur la flèche au centre de l'image...

 

ou cliquez [ici]



Matinée au
Creux du Van (Suisse)

samedi 31 octobre 2009

Troupe d'Etagnes (femelle du Bouquetin) et de jeunes.

Dans la falaise, un dernier Rougequeue noir.

La brume se lève sur la forêt.

Couleurs d'automne.

Encore des Rougequeues (les derniers avant l'hiver !)...

Tout près (trop !).

Sur le murger, le long de la réserve.



Petit texte :

"Geoffroy marche à l'envers sur la route infinie.
C'est elle qu'il voit, maintenant, dans un rêve, elle, la reine noire, la dernière reine de Meroë, fuyant les décombres de la ville pillée par les soldats d'Axoum. Elle, entourée de la foule de son peuple, les dignitaires et les ministres, les savants, les architectes, mais aussi les paysans et les pêcheurs, les forgerons, les musiciens, les tisserands, les potiers. Entourée du peuple des enfants, portant les paniers de nourriture, conduisant les troupeaux de chèvres, les vaches aux grands yeux en amande dont les cornes en forme de lyre portent le disque du soleil.
Elle est seule devant cette foule, seule à connaître sa destinée. Quel est son nom, à cette dernière reine de Meroë, celle que les hommes du Nord ont chassée de son royaume pour la jeter dans la plus grande aventure qu'il y ait eu sur la terre ?
C'est elle qu'il veut voir, maintenant, Candace, peut-être, la reine noire de Meroë, borgne et forte comme un homme, qui commandait aux troupes contre César et qui conquérait l'île Eléphantine. Strabon l'appelait ainsi, mais son vrai nom était Amanirenas.
Quatre cents ans après elle, la jeune reine sait qu'elle ne reverra plus jamais l'eau du grand fleuve, et que le soleil ne se lèvera plus sur les tombeaux des anciens rois de Meroë : Kashta, Shabako, Shebitku, Taharqa, Anlamani, Karkamani. Il n'y aura plus de livres pour y écrire le nom des reines, Bartare, Shanakdakhete, Lakhideamani...
Son fils s'appellera peut-être Sharkarer, comme le roi qui avait vaincu l'armée égyptienne à Jebel Qeili.
Mais celle qui voit n'est pas une reine d'apparat, portée dans son palanquin, sous un dais de plumes, entourée de prêtres et de musiciens. C'est une femme amaigrie, enveloppée dans un voile blanc, pieds nus dans le sable du désert, au milieu de la horde affamée. Ses cheveux sont défaits sur ses épaules, la lumière du soleil brûle son visage, ses bras, sa poitrine. Elle porte toujours sur son front le cercle d'or d'Osiris, Khenti Amenti, le Seigneur d'Abydos, de Busiris, et le diadème sur lequel sont inscrits les signes du soleil et de la lune, et les plumes des ailes du faucon. Portant autour du cou la tête de Maat, le père des dieux, le bêlier aux antennes de scarabéee enserrant Ankh, le dessin de la vie, Urs, le mot de la force.
Déjà depuis des jours, elle marche avec son peuple, elle ouvre la piste qui va vers l'endroit où le soleil disparaît chaque soir, Ateb, l'entrée du tunnel sur la rive ouest du fleuve céleste. Elle marche dans le plus terrible désert, avec son peuple, le lieu où souffle le vent brûlant, où l'horizon n'est qu'un lac de feu, le lieu où ne vivent que les scorpions et les vipères, où la fièvre et la mort rôdent la nuit entre les murs des tentes, enlèvent leur souffle aux vieillards et aux enfants..."

ONITSHA - JMG le Clézio



Voir la liste des anciens numéros du"Trochiscanthe nodiflore" (les archives) : cliquez [ici]

Site internet : Rencontres sauvages

Me contacter : pascal@pascal-marguet.com

Calendrier 2009 : Pour le télécharger directement au format pdf (900 ko), cliquez [ici]

 

Pour vous désinscrire, vous pouvez m'envoyer un e-mail (en répondant à ce message) avec pour objet "désinscription",

ou en cliquant

[ici]