Mardi 12 février 2008
Dernières images du site "Rencontres Sauvages" : 102
Si cette page ne s'affiche pas correctement, cliquez [ici]


Cabri de chamois bondissant.

La Cluse et Mijoux
(Haut-Doubs)

Lundi 28 janvier 2008

Attente.

Décision.

Elan.

Saut.

Réception.

Descente dans la pente.

Jeune chamois dans la falaise.

Suivi d'un autre cabri (au même endroit).

Poster que je viens de réaliser sur le thème des Chamois.

Pour l'agrandir, cliquez [ici]

 



Petit texte :

"
AU PIED DE MON ARBRE, JE…

L’arbre et la forêt sont emblématiques.

L’humanité a émergée de la forêt et les mythologies ont conservé le souvenir de ce point originel d’avant la conscience du temps.
Le plus souvent, l’image qui nous reste de ce monde est un jardin d’arbres aux fruits éternellement mûrs qui s’offrent à la cueillette ou bien nous sont offerts par des femmes très accueillantes en nous invitant à les déguster avec elles jusqu’à l’ivresse dans un présent perpétuel :
Paradis (du persan
paridaizas : enclos, jardin, verger du Seigneur), Eve au jardin d’Eden (de l’hébreu : volupté), Jardin aux pommes d’or des Hespérides (les sept filles du roi Atlas, transformé en montagne pour soutenir le ciel), Ile d’Avalon (du celtique aval : pomme ; abellio : pommier) où vivent Morgane et ses six sœurs ainsi que leur frère, le roi Arthus (le roi-ours, roi forestier en dormition et qui reviendra à la fin du monde…)... , en sont les plus vivaces souvenirs…

L’homme quitte la forêt tropicale. Beaucoup plus tard et beaucoup plus haut en latitude, dans la grande steppe froide des Ages Glaciaires, l’arbre (plutôt rare sous ces climats), souvent un bouleau, est l’unique point de repère vertical dans un monde horizontal : c’est le pivot, le centre du Monde, l’Arbre Ancêtre.
Les hommes, chasseurs nomades, ont coutume de le considérer comme point de ralliement et de réunion. Cet Arbre Eglise (du latin
ecclesia : assemblée) leur impose progressivement la conscience de sa verticalité pour devenir, d’abord pilier, puis ascension entre la terre et le ciel en tant qu’Arbre Cosmique ou Chamanique.
Odin, la divinité des poètes vikings, a inventé les Runes dans le Frêne Iggdrasill et les chamans sibériens vaticinaient sur le faîte d’un bouleau.
Lentement, le climat se réchauffe tandis que recule la steppe et que gagne la forêt. C’est maintenant le très vieil arbre vénérable isolé au milieu d’une grande clairière (ouverte par les bisons, aurochs et cerfs) au sein de l’immensité végétale qui représente le centre fondateur de la société.
Ce lieu porte le nom de
Nemeton (de nem : ciel : le ciel sur la terre, la clairière célèste) là où Ogmios, la divinité celte de l’éloquence, invente l’alphabet oghamique dit aussi Beth-Luis-Nion (les trois premières lettres) ou « alphabet des arbres », lequel est également un calendrier. Très tôt, l’arbre est associé au savoir.

Nombreux sont encore les Verneuil (verno : aulne et ialo : lieu ouvert), Chasseneuil (cassano : chêne et ialo) et autre Limeil (limo : orme et ialo)…

Entrer en forêt (de fors est : être hors de) sauvage (de silvaticus, silva : zone boisée) est initiatique et aventureux (de ad venturem : aller au devant de ce qui va venir) et rares sont ceux qui l’osent car elle est peuplée de personnages puissants qui y perpétuent l’ascension extatique et la vaticination poétique.
Kernunnos, le « Très Cornu », règne dans le dédale des puissants troncs d’arbres très anciens. Merlin à la cape en peau de loup, y est dit d’abord le sauvage puis le fou et enfin l’enchanteur. Il vit dans un château en cristal aux milles portes et fenêtres sur le faîte d’un pommier, pour moitié toujours en fleurs et en fruits. Viviane, l’envoûteuse Dame du Lac, l’enserre en une forêt enchantée après qu’il lui eut enseigné tout son art.
Le barde Taliesin au front brillant y chante le
Câd Coddeu, le Combat des Arbres qui avancent comme une armée d’hommes…

Le temps passe. La cognée, les troupeaux et la charrue des moines venus du sud ouvrent progressivement le paysage à la lumière tout en rejetant dans l’ex-communion : charbonniers, meneurs de loups, sorcières herboristes et autres sombres figures des bois.
Le chat
sylvestre rode dans la futaie et les sylvides fauvettes chantent dans le bosquet mais le petit charbonnier veut déjà marier la fille du laboureur et de la laitière car il désire la lumière des essarts où ils vivent.
Il faut être
futé pour pratiquer les chemins de la forêt semés d’embûches et de brigands au nez busqué qui peuvent tendent des embuscades à tous moments. Mais les porchers continuent la glandée sur les lisières et les chasseurs s’y embusquent à l’affût pour débusquer le cerf rembuché au risque d’être dévoré par le Sauvage, d’être enragé, touché par la rage silvatique, s’ils la fréquentent trop assidûment.
Et les chevaliers des romans courtois poursuivent leur Quête du grand cerf blanc dans la pénombre de la forêt cathédrale-labyrinthe aidés en cela par les conseils et les rêves de saints-ermites qui ont établi leur chapelle-ermitage près des sources ou dans les vieux chênes.

Au jor de Pasque, au tans novel
a Quaradigan, son chastel,
ot li rois Artus cort tenue ;
einz si riche ne fu veüe,
que molt i ot boens chevaliers,
hardiz et combatanz et fiers,
et riches dames et puceles,
filles de rois, gentes et beles ;
meis einçois que la corz fausist,
li rois a ses chevaliers dist
qu’il voloit le blanc cerf chacier
por la costume ressaucier.
Nos savomes bien tuit piece a
quel costume li blans cers a :
qui le blanc cerf ocirre puet
par reison beisier li estuet
des puceles de nostre cort
la plus bele, a que que il tort.

Erec et Enide - Chrétien de Troyes - XIIème siècle.

Le travail fait son oeuvre et les essarts progressent au point où le bocage s’installe dans le paysage. Isolé dans le pré ou maintenue en ligne dans la haie, on se détourne de l’arbre tandis que le cœur de la société devient, là où est le marché, l’église de la place du village avec son clocher de pierre dressé vers le ciel.
La tradition orale rurale des conteurs anonymes conserve encore sur quelques générations la trace de ce très long passé forestier au travers d’images comme arbres aux fées, arbres de mai (le Mai), haricots qui poussent jusqu’au ciel et même mâts de cocagne mais le monde sylvestre s’est profondément modifié.
La forêt résonne de la voix des meutes de chiens courants des chasses à courre de la noblesse arrogante et le petit peuple en est exclu :

« Défendons à toutes perfonnes de prendre en nos Forêts, Garennes,
Buiffons & Plaifirs, aucuns aires d’oifeaux, de quelque efpèce que ce foit ;
& en tout autre lieu, les œufs de Cailles, Perdrix & Faifans, à peine de cent livres d’amende pour la première fois, du double pour la feconde, & du foüet & banniffement à fix lieües de la Forêt pendant cinq ans pour la troifième.
...
Permettons néamnoins à tous Seigneurs, Gentilhommes & Nobles de chaffer noblement à force de chiens & oiseaux dans leurs Forêts, Buiffons, Garennes & Plaines pourvû qu’ils foient éloignez d’une lieüe de nos Plaifirs, même aux Chevreüils & bêtes noires, dans la diftance de trois lieües.
Leur permettons auffi de tirer de l’arquebufe fur toute forte d’oifeaux de paffage & de gibier, hors le cerf & la biche, à une lieüe de nos Plaifirs, tant fur leur terre, que fur nos Etangs, Marais & Rivieres. »

Ordonnance
de Colbert – 1669

Et cela est semblable pour les ressources végétales ligneuses. Alors paysans et autre menu peuple sont contraints d’y vivre dans la clandestinité jusqu’au mythique Raboliot de Maurice Genevoix d’entre les deux guerres et même après.
Le braconnier y chasse avec un braque (un chien d’arrêt silencieux) et le bricolier ou bricoleur y pose des bricoles ou collets qu’il relève régulièrement de droite de gauche, en allant de ci et de là.
La forêt constitue de même un refuge pour les rebelles à l’autorité dont le plus célèbre est Robin des Bois.
.."

Alain LETEVE* et Pascal MARGUET - Article paru en novembre 2003 dans l'Arantèle (revue du Réseau d'Education à l'Environnement 05&Ecrins).

Pour télécharger l'intégralité de l'article (en format PDF),

cliquez [ici]

J'ai aussi intégré ce texte au livret sur la "Terre" :

pour le voir, cliquez sur l'animation ci-dessous

ou [ici]

Attention, c'est une animation en "flash" qui peut prendre un peu
de temps à télécharger. Il y a de la musique : allumez vos hauts-parleurs !.
Cliquez sur "play", la petite flèche en bas de la première page.

* Alain est un ami, photographe-naturaliste et haut-alpin : j'ai déjà parlé de lui et de son [site internet] dans une précédente "newsletter".



Site de la semaine
:

Site de Sophie : au Pays d'Alice.

Pour voir le site, cliquez sur les images ci-dessus
ou [ici]



Voir la liste des anciens numéros de "Dernières Images" (les archives) : cliquez [ici]

Site internet : Rencontres sauvages

Me contacter : pascal@pascal-marguet.com

Calendrier 2008 : Pour le télécharger directement au format pdf (900 ko), cliquez [ici]

 

Pour vous désinscrire, vous pouvez m'envoyer un e-mail (en répondant à ce message) avec pour objet "désinscription",

ou en cliquant

[ici]